par Caroline Newhouse-Cohen, économiste chez BNP Paribas
- Le nouveau Chancelier a présenté, mardi 22 juin, son premier budget. Il prévoit le retour sous 3% du déficit budgétaire d’ici à cinq ans.
- Cet objectif devrait être atteint grâce à d’importantes baisses de dépenses, la hausse de la fiscalité ne participant que modestement à l’effort de consolidation budgétaire.
- Côté recettes, les mesures emblématiques sont le relèvement de la TVA de 17,5% à 20% et la taxation des banques ; côté dépenses : le gel des salaires des fonctionnaires et la réduction de 25% en termes réels des dépenses courantes des ministères.
par Caroline Newhouse-Cohen, économiste chez BNP Paribas
- Le nouveau Chancelier a présenté, mardi 22 juin, son premier budget. Il prévoit le retour sous 3% du déficit budgétaire d’ici à cinq ans.
- Cet objectif devrait être atteint grâce à d’importantes baisses de dépenses, la hausse de la fiscalité ne participant que modestement à l’effort de consolidation budgétaire.
- Côté recettes, les mesures emblématiques sont le relèvement de la TVA de 17,5% à 20% et la taxation des banques ; côté dépenses : le gel des salaires des fonctionnaires et la réduction de 25% en termes réels des dépenses courantes des ministères.
- Toutefois, le Chancelier semble minimiser l’effet du plan de rigueur sur la demande interne et, en particulier, la consommation des ménages. Le succès du plan de consolidation des finances publiques britanniques est en effet largement tributaire d’un retour à un rythme de croissance soutenue dès 2011.
Le nouveau Chancelier de l’Echiquier a présenté, mardi 22 juin, un budget extraordinaire, à peine plus d’un mois après la formation du gouvernement de coalition. Il s’agit d’un budget de rigueur malgré l’abandon « de la règle d’or »1. M. Osborne s’est engagé à ce que le solde budgétaire structurel retourne à l’équilibre d’ici à cinq ans et à faire en sorte que le ratio de dette rapporté au PIB commence à reculer à cet horizon. Le déficit public au sens du traité de Maastricht devrait ainsi baisser de plus de 11% du PIB cette année à moins de 3% d’ici à 2015. La dette publique rapportée au PIB se replierait à partir de 2013.
Le budget présenté par George Osborne repose principalement sur une baisse des dépenses de GBP 84 milliards sur cinq ans, soit 30 milliards de plus que prévu par le gouvernement travailliste. Au total, plus des trois quarts de l’effort de consolidation budgétaire (77%) proviennent de la réduction des dépenses. Au cours de la campagne électorale, les conservateurs avaient envisagé que les efforts de consolidation découlent à 80% de la réduction des dépenses. Il s’agit sans doute là d’une petite concession vis-à-vis des libéraux-démocrates. En particulier, les prestations sociales vont reculer de GBP 11 milliards en cinq ans. Tous les ministères, si ce n’est la santé et l’aide extérieure, verront leurs dépenses courantes réduites de 25%, en termes réels, en l’espace de quatre ans. Le détail des coupes dans les dépenses ne sera connu que le 20 octobre.
Ce budget ambitieux repose sur des hypothèses économiques optimistes, avec une accélération de la croissance dès 2011, à 2,3% après 1,2% cette année (puis 2,8% en 2012, 2,9% en 2013 et 2,7% en 2014 comme en 2015) soutenue par le dynamisme du commerce extérieur et la consommation des ménages. Ce scénario comporte toutefois certains risques, bien qu’il ait été révisé à la baisse par rapport aux hypothèses du précédent gouvernement travailliste (accélération marquée de la croissance du PIB à 3,25% en moyenne en 2011 et 2012). Après 0,3% t/t en début d’année, la croissance du PIB devrait accélérer au deuxième trimestre. Ainsi, entre février et avril, la production manufacturière a-t-elle progressé de 2,5% t/t après 1,3% t/t au T1 2010 et 0,9% t/t au T4 2009, sa première hausse en sept trimestres. Les dernières enquêtes conduites dans le secteur manufacturier – celle du CIPS ou du CBI – ont continué à suggérer des perspectives favorables à court terme. Au Royaume-Uni comme ailleurs, le secteur industriel a été soutenu récemment par le cycle des stocks et le redressement des échanges internationaux. Le fléchissement de la livre a par ailleurs amélioré la compétitivité-prix de l’économie. A moyen terme, l’effet du plan présenté par le nouveau Chancelier devrait, toutefois, freiner l’activité. En particulier, le revenu disponible des ménages sera entamé par le relèvement de la TVA et la réduction des prestations sociales dès l’année prochaine, alors que le taux de chômage pourrait ne pas baisser aussi rapidement que prévu. L’Office of Budget Responsibility, OBR, anticipe que ce dernier devrait culminer cette année à 8,1% avant de reculer et d’atteindre 6,1% en 2015. Or, la fonction publique a créé des postes pendant la crise, contrairement au secteur privé qui en détruisait. Pour l’heure, les conditions sur le marché du travail continuent de se détériorer et ne devraient s’améliorer que très progressivement, compte tenu de perspectives de croissance inférieures au potentiel. Par ailleurs, les efforts de consolidation budgétaire entrepris dans la plupart des pays de l’Union européenne devraient peser sur la demande interne de la zone qui est le premier partenaire commercial de la Grande-Bretagne et limiter le dynamisme des exportations de produits britanniques.
Les principales mesures annoncées sont
Réductions des dépenses
- Les salaires dans la fonction publique vont être gelés pour deux ans. Toutefois, les fonctionnaires qui gagnent moins de GBP 21 000 par an bénéficieront d’une augmentation de GBP250 annuels au cours de la période.
- Le contrôle du système d’aide sociale devrait permettre d’économiser GBP11 milliards d’ici à 2014/15.
- Les allocations familiales seront gelées pour les trois prochaines années.
- Les crédits d’impôts seront diminués à partir de l’année prochaine pour les familles gagnant plus de GBP 40 000.
- Les allocations grossesse seront supprimées à partir d’avril 2011, et les allocations maternité ne seront maintenues que pour le premier enfant.
- A partir de 2011 – mis à part la retraite du système général – les allocations, les crédits d’impôts et les retraites dans la fonction publique seront indexés sur l’indice des prix à la consommation plutôt que sur l’indice des prix au détail, RPI. Cette mesure devrait permettre d’économiser GBP 6 milliards annuels sur cinq ans, soit 15% de la réduction prévue des dépenses. L’OBR anticipe en effet que l’inflation mesurée par l’indice des prix à la consommation devrait atteindre 2,7% à la fin de l’année et retourner vers son objectif de 2% à moyen terme. Par ailleurs, l’inflation mesurée le IPC est en moyenne inférieure de 0,5 pp à celle mesurée par le RPI.
- Les allocations logement seront limitées à GBP 400 hebdomadaires, ce qui devrait permettre d’économiser GBP 1,8 milliard annuel d’ici à la fin de cette législature.
- A partir de 2013, que ce soit pour les anciens ou les nouveaux demandeurs, le gouvernement introduira une visite médicale obligatoire pour l’octroi de l’allocation adulte handicapé.
- Le gouvernement va accélérer le relèvement de l’âge de départ à la retraite prévu à 66 ans.
Hausses des recettes
- A partir du 4 janvier 2011, le taux de TVA sera relevé de 17,5% à 20%. Les articles aujourd’hui non taxés, comme l’habillement junior et les livres, ne seront pas touchés. Les conservateurs avaient promis de ne pas modifier le taux de la TVA, alors que le parti libéral-démocrate avait fait campagne contre cette mesure. Le relèvement de la TVA représente 80% de la hausse des recettes attendues sur cinq ans. Il devrait rapporter GBP 13 milliards annuels.
- L’impôt sur les plus values en capital demeurera à 18% pour les petits épargnants mais passera à 28% pour les contribuables dont la dernière tranche d’imposition est la plus élevée, avec effet immédiat.
- Un impôt sur le bilan des banques, des sociétés hypothécaires et des succursales britanniques des banques étrangères sera introduit dès 2011. Le taux d’imposition sera fixé la première année à 0,04% puis à 0,07% en 2012. Les petites banques en seront exemptées. Cet impôt devrait rapporter plus de GBP 1 milliard en 2011 et GBP 2 milliards par an à partir de 2012. De concert avec le gouvernement britannique, Paris et Berlin ont annoncé, le jour de la présentation du budget de M. Osborne, leur volonté d’instaurer un nouveau prélèvement sur les établissements bancaires de leur pays respectif. Les modalités de ce nouvel impôt pourront, toutefois, varier selon le contexte et la fiscalité nationale.
- L’exonération fiscale pour l”industrie du jeu vidéo sera supprimée.
Mesures en faveur des entreprises
- L’impôt sur les sociétés sera abaissé à 27% l’année prochaine et de 1% par an au cours des trois années suivantes, jusqu’à ce qu’il atteigne 24%. Le Royaume-Uni disposera ainsi du taux d’imposition sur les sociétés le plus faible des pays du G7. L’impôt sur les petites sociétés passera à 20%.
- A partir d’avril 2011, le seuil à partir duquel les employeurs commencent à payer des charges sociales sera relevé.
- Les entrepreneurs qui lanceront de nouvelles activités à l’extérieur de Londres, des régions sud-ouest et est de l’Angleterre, seront exonérés de charges sociales pour leurs dix premiers employés, et ce jusqu’à GBP 5 000.
Mesures sociales
- Le seuil minimal d’imposition sur le revenu sera relevé de GBP1 000 en avril à GBP 7 475 de revenus annuels. 880 000 personnes seront ainsi exemptées. Cette décision va dans le sens des propositions des libéraux-démocrates, qui s’étaient prononcés pendant la campagne en faveur d’une sortie de l’assiette fiscale de tous les contribuables gagnant moins de GBP 10 000.
- Il ne sera pas demandé aux parents isolés d’être à la recherche d’un emploi si leur plus jeune enfant n’est pas encore scolarisé.
NOTES
- La règle d’or avait été adoptée par le gouvernement travailliste et stipulait que le solde budgétaire devait être équilibré au cours du cycle économique, d’une part, et que la dette publique resterait inférieure à 40% du PIB, d’autre part.
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