par Mark Holman, CEO, Twentyfour AM
La perspective d’une accalmie estivale est nettement moins probable après la brusque chute des marchés du risque ce lundi et le rebond des actions qui s’en est suivi. A l’approche des vacances, les investisseurs doivent prendre en compte les deux interrogations suivantes : la dégringolade de lundi dernier annonce-t-elle de nouvelles baisses des marchés ou le rebond illustre-t-il la disposition des investisseurs à mobiliser des liquidités pour acheter au moindre repli ?
Ces deux forces vont jouer un rôle majeur, mais dans l’ensemble, le risque d’un incident de parcours qui viendrait entraver la reprise économique est possiblement imminent.
Tout d’abord, les marchés ont accompli des progrès significatifs depuis la crise économique de l’an dernier. Toutefois, la reprise n’est peut-être pas aussi forte que ce que les marchés attendaient à l’origine, notamment après la réouverture complète de l’économie, comme en témoignent les indicateurs économiques en provenance de Chine, qui, au début du mois, ont poussé la Banque populaire de Chine à réduire plus vite que prévu ses exigences de fonds propres.
Deuxièmement, les marchés ont sous-estimé la capacité du variant delta à freiner les chiffres de la croissance au troisième trimestre. L’approche adoptée par les responsables politiques des pays développés semble aujourd’hui consister à permettre au variant de se diffuser dans la population en comptant sur la réussite des campagnes de vaccination pour maintenir les hospitalisations et la mortalité au plus bas. Même si cette stratégie pourrait s’avérer la bonne, le double écueil que représentent la contamination par la maladie et l’obligation d’isolement empêche actuellement des pans entiers de la population active d’aller au travail. Parallèlement, dans les pays moins bien vaccinés, les taux de mortalité vont augmenter et les réactions des autorités seront variables. Là encore, l’économie n’a toujours pas atteint sa pleine capacité, et les chaînes d’approvisionnement devraient rester perturbées.
Pour nous, l’été s’annonce légèrement mouvementé principalement en raison des résultats incertains que donnera la stratégie des gouvernements des pays développés, qui consiste à permettre la circulation du virus dans la population. Les marchés vont devoir encaisser de nombreuses actualités négatives pendant plusieurs semaines tant que cette stratégie perdure, ce qui n’exclut pas des annonces ponctuelles de changement de politique. Jusqu’à présent, les restrictions imposées par les confinements ont mis fin à toutes les vagues successives du virus. Des changements politiques précipités – à l’image des Etats-Unis qui recommandent à leurs résidents de ne pas voyager au Royaume-Uni – sont probables, ce qui va déstabiliser les marchés et freiner la croissance.
Compte tenu de l’accumulation de richesse dans le secteur de la banque privée au deuxième trimestre et des nombreuses recommandations des banques d’investissement en faveur d’une baisse modeste du niveau de risque, il semble évident que les investisseurs se sont placés dans l’attente d’événements à court terme sur le marché. En outre, toute baisse de l’activité économique ne ferait que justifier le positionnement des principales banques centrales, qui prolongeraient alors leurs politiques extrêmement accommodantes.
Les marchés des bons du Trésor intègrent déjà dans leurs cours une grande partie de ces facteurs : les rendements à 10 ans se situent désormais à 50 points de base en deçà de leur sommet atteint plus tôt cette année. De même, la courbe des taux à 2/10 ans s’est nettement aplatie pour s’établir sous les 100 points de base. Dès lors, même si cet éventuel incident de parcours risque de provoquer de nouvelles pressions inflationnistes temporaires, il permettra également de limiter en partie l’envolée de la croissance, ce qui pourrait contribuer à la stabilisation des bons du Trésor. Les fluctuations subies par ces derniers vont en effet jouer un rôle fondamental pour les marchés du risque au quatrième trimestre.
Pour ce qui est du risque de crédit obligataire, cela ne provoquera pas d’évolution importante des fondamentaux, qui restent positifs. Néanmoins, les valorisations pourraient gagner en attractivité et offrir à ceux qui disposent des liquidités et des soldes de trésorerie adéquats des possibilités d’améliorer leurs portefeuilles.