par Eric Vergnaud, économiste chez BNP Paribas
La reprise s’est amplifiée à travers le monde depuis le début de l’année et la progression du PIB mondial devrait atteindre 4% tant cette année qu’en 2011. En outre, elle est de moins en moins dépendante du soutien des dépenses publiques et du cycle des stocks, alors qu’elle l’est de plus en plus de la demande privée.
Toutefois, le rebond de celle-ci est limité par le processus de désendettement, l’ajustement du marché de l’emploi et par un tournant plus restrictif des politiques économiques, avec par exemple la consolidation budgétaire engagé en Europe.
Au total, la reprise de l’économie mondiale est très inégale, les pays émergents pouvant espérer une croissance du PIB de près de 6,5% cette année et 6% l’année prochaine. Dès lors, pour les autorités monétaires et budgétaires, il ne s’agit plus s’agit plus de relancer l’activité à tout prix (comme au début de l’année dernière), mais bien de prévenir tout risque de surchauffe.
En revanche, la croissance devrait plutôt se situer autour de 2% dans les pays développés au cours de la même période. Au sein même de ceux-ci, les différences sont très marquées. La reprise américaine semble installée sur un rythme de progression du PIB proche de 3%, alors que dans la zone euro, les mesures de consolidation des finances publiques, si elles sont éminemment nécessaires, vont peser sur une demande intérieure tout juste convalescente. Cela ne sera que partiellement compensé par le surcroît d’exportations permis par la baisse de l’euro. Au total, après un peu plus de 1% cette année, la croissance devrait repasser très nettement sous ce rythme en 2011.
Dans ce contexte, il faut souhaiter que l’entente et la volonté d’avancer affichée au G20 de Washington en septembre 2008 puis à celui de Londres d’avril 2009 soient de nouveau de mise à Toronto ce week-end. Les sujets de désaccords sont nombreux, que ce soit sur les moyens de soutenir la croissance économique ou dans le domaine de la régulation et de la supervision financières. Ainsi, les Etats-Unis veulent soutenir la croissance, et tout en mettant en avant leur détermination à réduire les déficits à long terme, ils ne manquent pas de souligner le risque que la consolidation budgétaire en Europe fait peser sur la croissance, à court terme. Certes, plus de coordination dans les mesures d’assainissement des finances publiques mises en place en Europe (zone euro et Royaume-Uni) serait bienvenue. Plus globalement, c’est tant en matière des politiques de soutien de la croissance à court terme que de celles visant à résorber les déséquilibres que la coordination est nécessaire et ceci à l’échelle du G20. En outre, il serait également éminemment souhaitable que les Etats-Unis fassent preuve de moins « d’isolationnisme réglementaire ».
Comme prévu, lors de sa réunion des 22 et 23 juin, le Federal Open Market Committee (FOMC) a conservé la fourchette de 0 à 0,25% au sein de laquelle il souhaite voir évoluer le taux des Fed funds. Par ailleurs, il souligné l’orientation moins favorable des conditions financières et la modération des prix et a indiqué, plus généralement, que les conditions économiques devraient justifier un maintien du taux des Fed funds « à un niveau exceptionnellement bas pendant une période prolongée ». Les turbulences sur les marchés provoquées par la crise de la dette européenne semblent inciter les membres du FOMC à faire preuve d’encore plus de prudence qu’auparavant. Certains observateurs estiment que les craintes d’un essoufflement de la reprise américaine (et les risques toujours présents de déflation) pourraient conduire à envisager la mise en place de nouvelles mesures non conventionnelles sous la forme d’achats d’actifs.
Toutefois, même révisée à la baisse à 2,7% au T1 (en rythme trimestriel annualisé) contre 3% initialement estimé, la croissance reste solide. En outre, la taille déjà importante du bilan de la Fed (USD 2 400 milliards) pourrait nourrir les oppositions à de telles décisions, au sein même du FOMC.
La baisse de l’euro a marqué une pause, mais elle devrait reprendre, alimentée par les écarts de croissance actuels et anticipés entre les Etats-Unis et la zone euro et la persistance très probable de tensions sur la dette souveraine des pays périphériques de l’UEM. La parité EUR/USD devrait se diriger vers 1,10 d’ici à la fin de l’année.