par Marie-Pierre Peillon, Directrice de la Recherche de Groupama AM
Etats-Unis : Le risque lié à la politique fiscale persiste
L’économie américaine a enregistré une légère baisse de la croissance au cours du dernier trimestre 2012. L’écart avec la bonne performance du troisième trimestre s’explique principalement par l’évolution défavorable des composantes les plus volatiles (variation des stocks et dépenses dans le secteur de la défense).
En revanche, les données sur la demande finale ont montré des signes clairs d’amélioration: redressement de la consommation des ménages, rebond de l’investissement en biens d’équipements et renforcement de l’investissement résidentiel.
Bien que le resserrement fiscal lié à l’accord sur la falaise budgétaire devrait peser sur l’activité au premier trimestre de cette année, les premiers indicateurs avancés disponibles depuis la hausse des taxes ont été dans l’ensemble encourageants. En parallèle, la reprise sur le marché du travail se poursuit à un rythme graduel, avec toutefois une légère décélération des créations nettes d’emplois sur le premier mois de l’année 2013.
Mais, le risque lié à la politique fiscale reste élevé pour les prochains mois. De nombreuses dates butoir approchent : coupes automatiques des dépenses et fin du budget temporaire en mars, augmentation du plafond de la dette en mai. L’absence d’accord entre les républicains et les démocrates entrainerait un durcissement budgétaire excessif qui pourrait sensiblement affecter la croissance américaine.
Zone euro : Vers une sortie progressive de la récession
Sans surprise, la zone euro a terminé l’année 2012 en net repli (-0,6%t/t) après avoir déjà enregistré une contraction d’activité au deuxième et troisième trimestre. Sur l’ensemble de l’année, la croissance a reculé de 0,5%, une très mauvaise performance après une progression de 1,5% en 2011. Comme il fallait s’y attendre, la récession s’est généralisée fin 2012, les économies telles que l’Allemagne et la France ont aussi enregistré un recul sensible de leur activité. Les autres pays de la zone comme l’Italie, l’Espagne et le Portugal ont connu des rythmes de contraction beaucoup plus sévères.
Pour autant, l’horizon semble s’éclaircir en 2013. La retombée des tensions et l’amélioration des conditions sur les marchés financiers ont conduit à un redressement des indicateurs de confiance en Janvier pour le troisième mois consécutif, suggérant une sortie progressive de la récession à partir du printemps prochain. Pour le moment, l’amélioration est essentiellement tirée par l’Allemagne qui devrait retrouver le chemin de la croissance dès le premier trimestre tandis que la France continue de décrocher, signe que les ajustements ne sont pas encore terminés. Enfin, la situation dans les pays périphériques reste encore difficile.
Au-delà des perspectives économiques plus favorables, l’incertitude politique en Italie (élections) et en Espagne pourrait de nouveau peser sur les marchés financiers et les indices de conjoncture. Tout n’est donc pas réglé et le Président de la BCE ne s’y est pas trompé en déclarant récemment qu’il était trop tôt pour parler de stratégies de sortie.
Pays émergents : Sur de bons rails
La croissance s’est accélérée en Asie et en Amérique Latine au quatrième trimestre, phénomène qui devrait se prolonger encore quelques trimestres. Ce redémarrage a été expliqué par une combinaison de facteurs : (1) l’impact des relances monétaire et/ou budgétaire mises en œuvre en 2012 ; (2) la résilience du commerce intra-zone en Asie ; (3) la diminution des risques extrêmes et l’amélioration des conditions de crédit sur les marchés financiers internationaux. Par voie de conséquence, les flux de capitaux des économies avancées vers les pays émergents se sont redressés.
En Chine, cette combinaison de facteurs a continué de jouer en janvier, soit juste avant le nouvel an chinois, comme en ont témoigné les conditions de crédit, le commerce extérieur et les indices PMI. Les attentes autour des priorités de la nouvelle administration (la transition politique aura lieu en mars) ont aussi joué un rôle. Le Conseil d’Etat (rassemblant le plan chinois et les ministères concernés) a publié un rapport qui présente des recommandations pour rééquilibrer l’économie chinoise vers la consommation au travers d’une baisse des inégalités, par l’intermédiaire d’une meilleure couverture des besoins sociaux par les systèmes de santé et de retraite. L’un des axes identifiés tient dans la réduction de l’épargne des entreprises (20% du PIB) et dans sa redistribution aux ménages, directement et au travers des finances publiques. Ceci valide notre scénario d’un rééquilibrage supplémentaire de la croissance chinoise vers la consommation à partir de 2014.