par Léon Cornelissen, Lukas Daalder et Ronald Doeswijk, stratégistes chez Robeco
Les informations du secteur industriel international ont été généralement optimistes en novembre. La crise de la dette européenne s’est encore intensifiée après la décision des leaders européens de faciliter les restructurations souveraines à l’avenir. Par conséquent, le scénario le plus probable consisterait à faire au mieux pour s’en sortir. Les marchés émergents affichent une vigueur continue et, par endroits, des pressions inflationnistes accrues, qui sont en train d’être enrayées par des mesures prudentes de resserrement monétaire.
Nous maintenons notre attitude positive concernant les actions, même si nous avons revu à la baisse notre optimisme depuis un mois, en raison des tensions croissantes dans la zone euro. Par conséquent, nous préférons modérer notre profil de risques à tous les niveaux, ce qui inclut les actions.
Opinion macroéconomique
Les informations du secteur industriel international ont été généralement optimistes en novembre. La Chine, les États-Unis, le Royaume-Uni et la zone euro ont tous enregistré de solides résultats pour leurs indices des directeurs d'achat. Le Japon a fait exception. La vigueur de la zone euro élargie masque le caractère inégal de la reprise dans la région. La France et l’Allemagne s’en sortent particulièrement bien, mais la périphérie sud souffre davantage. La crise de la dette européenne s’est encore intensifiée après la décision des leaders européens de faciliter les restructurations souveraines à l’avenir.
L’Irlande a été poussée dans le filet de sécurité. Le Portugal sera sans doute le prochain candidat. Le filet de sécurité est actuellement suffisant pour ces deux petites économies, mais des doutes ont été soulevés quant à la capacité de gérer les difficultés de l’Espagne. Au moment de la rédaction de ce document, les marchés financiers attendent impatiemment les mesures décisives des dirigeants européens. Le scénario le plus probable consisterait à faire au mieux pour s’en sortir (avec une certaine restructuration de la dette à long terme), une monétisation importante de la dette semblant peu probable. Les marchés émergents affichent une vigueur continue et, par endroits, des pressions inflationnistes accrues, qui sont en train d’être enrayées par des mesures prudentes de resserrement monétaire.
– Amérique du Nord
Aux États-Unis, les perspectives économiques enregistrent une certaine amélioration. Après une forte baisse des estimations consensuelles pour la croissance économique en août, 400 septembre et octobre, les résultats ont été stables en novembre et décembre, à 2,7 % pour 2010 et à 2,4 % pour 2011. Les données macroéconomiques récentes ayant souvent créé de bonnes surprises, nous ne prévoyons pas de nouvelles révisions à la baisse à ce stade. Le marché du travail suit une nette tendance haussière. Les données mensuelles de l’emploi sont mitigées depuis six mois. Mais elles ne reflètent pas vraiment la situation, car le marché de l'emploi du secteur privé est en train de se redresser comme en 2003-2004, étant donné que la moyenne des heures travaillées est en hausse.
En outre, les données mensuelles reflètent aussi une réduction de l’emploi dans le service public, ce qui n’affecte pas le total des heures travaillées dans le secteur privé. Nous maintenons notre point de vue selon lequel une reprise économique ne se fait jamais sans une reprise de l’emploi. La reprise de l’emploi devrait soutenir la consommation privée. Conformément aux prévisions de l’OCDE, selon lesquelles les ratios d’épargne des ménages vont se stabiliser dans le monde entier en 2010 et 2011, une hausse des revenus devrait aussi stimuler la croissance de la consommation. Et c'est exactement ce qui est en train de se passer. La consommation privée a enregistré une hausse annualisée de 2,8 % au troisième trimestre, contre 2,2 % au deuxième trimestre. Les ventes de détail ont enregistré une croissance d’environ 7 % d’une année sur l’autre en septembre et octobre et ne sont inférieures que de 2 % au niveau des ventes de détail enregistré avant la crise financière qui a démarré fin 2007.
Les entreprises hors des secteurs de la finance affichent des bilans solides, avec d’énormes réserves de liquidités. Le marché de l’immobilier et le déficit budgétaire public restent les principales sources d’inquiétude. Avec 4 millions de logements invendus et des estimations selon lesquelles les banques auraient encore dans leurs registres 2 millions de maisons qui attendent d'être mises en vente, il faudra plus d'un an pour vendre la totalité de ces logements, le taux de roulement des ventes immobilières annuelles étant actuellement de 4,4 millions. Ceci est un facteur négatif pour les prix de l’immobilier, qui pourraient bien encore baisser après leur reprise modérée depuis le printemps 2009.
Par ailleurs, les investisseurs ne prêtent pas particulièrement attention au déficit budgétaire américain, pourtant les réductions budgétaires sont inévitables après la victoire des Républicains lors des dernières élections de mi-mandat. Ceci dit, nous pensons que les évolutions macroéconomiques l’emportent sur ces risques. En parallèle, la politique monétaire va enregistrer un net desserrement, car les risques inflationnistes sont en demi-teinte.
– Europe
Le secteur industriel britannique (13 % du PIB britannique) s’est montré étonnamment solide en novembre. L'indice des directeurs d'achat dans le secteur industriel a atteint 58, le plus haut niveau depuis 1994. Par conséquent, la Banque d’Angleterre (BoE) ne va pas relancer un desserrement quantitatif. L’inflation est restée supérieure au seuil des 3 %, forçant le gouverneur de la Banque d’Angleterre à écrire une quatrième lettre publique embarrassante au Chancelier de l’Echiquier.
D’autres lettres sont à prévoir, ne serait-ce qu’en raison des conséquences inflationnistes de la hausse de la TVA en janvier. Aucune hausse des taux d’intérêt n’est cependant à prévoir en 2011.
En novembre, le secteur industriel de la zone euro a atteint son plus haut niveau en quatre mois (55,3). Mais cette reprise reste inégale. La France et l’Allemagne s’en sortent particulièrement bien, mais la périphérie sud reste faible. Les tensions sur les marchés obligataires européens se sont intensifiées après la décision des leaders européens de faciliter les restructurations souveraines à l’avenir. L’Irlande a été forcée d’ utiliser le filet de sécurité européen. La pression sur le Portugal et l’Espagne s'est renforcée et même la Belgique et l'Italie commencent à être touchées. L’euro a enregistré au passage une forte baisse. Il reste à savoir comment la nouvelle crise de la dette sera traitée par les décideurs européens. La politique monétaire devrait rester au desserrement pendant toute l’année 2011 afin de compenser les effets macroéconomiques négatifs des tensions actuelles.
– Région Pacifique
La croissance japonaise devrait ralentir pour passer d’environ 3 % en 2010 à environ 1,0-1,5 % en 2011. Les derniers chiffres du PIB ont été étonnamment élevés, du moins à première vue. Au troisième trimestre, l’économie a enregistré une croissance de 0,9 % d’un trimestre sur l’autre, supérieure aux 0,6 % prévus. Cependant, la bonne surprise est surtout due à la forte demande des consommateurs (+1,1 % d’un trimestre sur l’autre), liée à l’expiration imminente des bonus éco des primes à la casse. Le secteur externe n’a pas dans l’ensemble contribué à la croissance. Globalement, la bonne surprise procurée par ces chiffres a été contrebalancée par les implications négatives en termes de croissance au dernier trimestre, qui on poussé le yen à se déprécier par rapport au dollar. Il s’agit d’un facteur positif pour les exportations et la production industrielle. Alors que la croissance de la production industrielle est tombée à 4,5 %, les fabricants vont voir d'un bon œil la dépréciation du yen enregistrée depuis un mois. Nous avons du mal à nous montrer optimistes concernant les perspectives économiques du Japon, car le vieillissement de la population a des conséquences très négatives sur la croissance économique et le pays affiche un ratio dette/PIB élevé. Le Japon a grandement besoin d’une légère inflation.
L’Australie continue d’enregistrer une forte croissance pour une économie mature. Au troisième trimestre, le PIB a augmenté de 2,6 % d’une année sur l’autre, soit moins que prévu, car la vigueur de la monnaie a eu des conséquences sur les exportations. Néanmoins, il est probable qu’une croissance correcte se poursuive car l’Australie bénéficie des prix élevés des matières premières qui résultent de la forte demande de la Chine.
Alors que l’inflation sous-jacente suit une tendance haussière et se rapproche de la fourchette haute des 2-3 % d’inflation, la Reserve Bank of Australia a relevé les taux d’intérêt de 3 % à 4,75 %. Mais avec une croissance plus faible que prévu, un nouveau desserrement monétaire en Chine et un ralentissement limité de l’économie chinoise en 2011, de nouvelles hausses de taux semblent inutiles en Australie.
– Marchés émergents
L’inflation chinoise a atteint des niveaux inconfortables, atteignant 4,4 % en octobre. Par conséquent, la banque centrale a relevé les taux d’intérêt en octobre, sa première hausse depuis 2007, et a lancé de nouvelles mesures de resserrement pour le secteur bancaire. Les inquiétudes concernant un ralentissement de la Chine sont en train de se dissiper maintenant que l’indice des directeurs d’achat du secteur industriel chinois a augmenté pour le quatrième mois consécutif (à 55,2) en novembre. En parallèle, les prix des intrants s’envolent, rendant possible une nouvelle hausse modérée des taux d’intérêt dans les prochains mois.
Comme prévu, la forte mousson a entraîné une baisse des prix alimentaires en Inde. L'indice des prix de gros, qui a atteint 8,6 % en octobre, devrait diminuer progressivement. La banque centrale, qui a prudemment augmenté les taux d’intérêt six fois en 2010, semble décidée à ne pas agir, même si l’économie indienne enregistre des résultats record. L’économie indienne a affiché une croissance de 8,9 % au deuxième trimestre fiscal, dépassant une nouvelle fois les prévisions.
L’inflation brésilienne est à la hausse malgré la forte appréciation du real cette année. Affichant 5,5 %, l’inflation a dépassé l’objectif du gouvernement à 4,5 % pendant trois mois d’affilée. Puisque la confiance des producteurs recommence à augmenter, le ralentissement de l’économie brésilienne ne serait que temporaire. Des mesures de resserrement monétaire devraient donc être bientôt mises en place.
Notamment en raison de la sécheresse estivale, l’inflation russe a pris de la vitesse et devrait atteindre environ 8,7 % cette année. La banque centrale est revenue sur sa promesse de maintenir ses taux d’intérêt principaux à un plus bas record de 7,75 % dans les prochains mois. Une légère hausse des taux d’intérêt est donc à prévoir au premier trimestre 2011.