par Emmanuel Bourdeix, Directeur Gestion Actions, et Franck Nicolas, Directeur Allocation globale chez Natixis AM
Pour les actions, 2010 s’est conclue par une progression des marchés actions internationales d’environ 10 %, en ordre dispersé toutefois, à l’instar de la surperformance de près de 15 % du marché allemand par rapport au marché français. Les conditions sont réunies aujourd’hui pour que 2011 soit l’année des actions, en particulier européennes.
Progression à 2 chiffres attendue pour les actions européennes
Tout d’abord, le niveau de valorisation des actions, sans être bon marché, est raisonnable : à 11 fois les bénéfices attendus pour 2011, le multiple de valorisation des actions européennes est historiquement bas. Il est difficile malgré tout d’escompter une dilatation de ce multiple sans embellie sur la macro-économie. Il est également peu probable que ce multiple se contracte, sauf si la probabilité d’une récession en double creux ne regagne en probabilité. Dans l’hypothèse d’une stabilité des multiples de valorisation, la progression des bénéfices attendus en 2011 pourrait être légèrement inférieure à 15, les entreprises gardant encore un potentiel d’amélioration de leurs marges. Une partie de cette information est d’ores et déjà intégrée dans le cours des actions.
Ainsi, le potentiel de performance boursière pour les actions européennes en 2011 devrait être à deux chiffres du fait du retour d’une thématique survendue l’année dernière et oubliée à tort cette année : celle des fusions-acquisitions.
Comme en 2010, les actions continuent d’afficher un taux de profit relativement attractif par rapport aux obligations gouvernementales, voire aux obligations corporate. Ainsi, il est tentant pour une entreprise d’émettre de la dette pour financer le rachat de ses propres actions… ou celles d’une autre entreprise. Contrairement à l’année dernière, où la volatilité des marchés actions était moyenne à élevée, nous observons actuellement un changement de configuration d’ordre technique. La volatilité quotidienne des marchés actions se limite à des variations de +/- 1 % en moyenne, il est donc plus facile et moins risqué d’implémenter ce type d’opérations. En conséquence, les opérations de rachat d’actions et de fusion-acquisition devraient croître en volume significativement en 2011, permettant ainsi d’entrevoir environ + 10 % de progression sur les marchés européens. Le retour de cette thématique sera en particulier très profitable aux petites et moyennes capitalisations, qui devraient ainsi continuer de surperformer les grandes capitalisations.
Les actions de pays développés privilégiées
En termes d’allocation géographique, depuis quelques années les actions émergentes ont largement surperformé celles des pays développés. Désormais, le différentiel de croissance en faveur des émergents commence à être bien intégré dans les valorisations. Sans pour autant remettre en cause une vue positive à moyen/long terme, une attitude plus prudente s’impose tactiquement sur les marchés émergents. L’appréciation trop rapide des devises émergentes et les pressions inflationnistes constituent de réelles menaces à court terme, notamment pour les 3 grands : Brésil, Inde et Chine.
En ce début d’année, notre préférence est en faveur des actions des pays développés, notamment américaines et surtout européennes. Celles ci disposent d’un potentiel de rattrapage important, dès lors que l’aversion au risque sur les dettes souveraines périphériques commencera à refluer.
Au sein des pays émergents, une plus grande prudence s’impose sur 3 des BRIC. La bonne surprise pourrait venir de l’Europe émergente, parent pauvre en 2010, des flux de capitaux vers les émergents par rapport à l’Amérique Latine et l’Asie émergente, notamment du fait de sa trop grande proximité avec la zone euro, exposée aux problèmes de risque souverain. Le poids de la Russie dans la capitalisation de ces marchés et son exposition au thème des matières premières sont un atout supplémentaire pour croire en une surperformance de l’Europe émergente cette année.
2011, pourrait par ailleurs être l’année d’une meilleure diversification sectorielle. Les secteurs cycliques sont moins favorisées, en raison de leur surperformance sur les valeurs défensives. Les financières européennes devraient se renforcer progressivement au fur et à mesure de la décrue du risque souverain. Au sein des financières, en dépit des impacts de Bâle III, des courbes des taux bien plus pentues en moyenne cette année devraient permettre aux banques de détail, qui empruntent à taux court pour financer des crédits long terme, d’afficher des résultats en hausse significative.
Rester flexible
Une progression à deux chiffres pour les actions européennes et des plages de faible volatilité réalisée sont à attendre sur fond d’abondance de liquidités et de profits en croissance significative Pour autant, les vues des macroéconomistes restent somme toute divergentes. A contrario des marchés actions, l’aversion au risque remonte déjà depuis plusieurs mois sur les marchés de taux, souvent précurseurs des marchés actions. Des phases de forts replis sont ainsi encore à prévoir. Il faudra savoir privilégier une approche tactique flexible pour profiter des opportunités de marché et se renforcer sur la classe d’actifs qui nous semble la plus prometteuse pour 2011 : les actions.
L’intérêt devises émergentes
Du côté des devises, si les actions émergentes seront un peu pénalisées par les incertitudes liées à l’inflation dans ces zones, les monnaies émergentes conserveront un intérêt. En effet, des resserrements monétaires devraient intervenir sur certaines zones restant favorables aux devises dans une industrie de l’investissement globalement en recherche de rendement.
La marche en avant des matières premières
Les matières premières, directement sensibles à la croissance devraient continuer leur marche en avant. Le pétrole pourrait marquer un plateau même si un passage au–dessus de 100 $ dans l’année est plus qu’envisageable. Les métaux industriels et les matières premières agricoles ont un potentiel de hausse plus important encore. En revanche, l’or, dans son potentiel de valeur refuge perd un peu de sa pertinence dans cette configuration.