Obama : bilan et perspectives

par Marie-Pierre Ripert, économiste chez Natixis

Après plusieurs semaines de convergence des intentions de vote entre les deux candidats à la présidence des Etats- Unis, Barack Obama a finalement été réélu pour un second mandat de quatre ans. Sans grande surprise, le Congrès américain reste divisé, la Chambre des représentants maintient une majorité républicaine alors que les démocrates gardent la main sur le Sénat en renforçant légèrement leur pouvoir (53 vs 51).

Cela signifie que B. Obama va devoir continuer de composer avec les républicains et que la mise en œuvre de son agenda est loin d’être acquise. En effet, la division du Congrès, qui dure depuis déjà deux ans, n’est pas neutre pour les prises de décisions politiques comme en témoignent les difficultés rencontrées ces deux dernières années pour trouver des compromis, en particulier sur l’augmentation du plafond de la dette publique en août 2011 qui avait d’ailleurs conduit à la dégradation d’un cran de la note américaine par S&P. Ainsi, les deux prochaines années devraient être dans la lignée des deux dernières.

L’agenda d’Obama 2012 paraît bien terne comparé à celui d’il y a quatre ans. Rappelons qu’en 2008, les principaux engagements du programme d’Obama portaient sur une réforme fiscale visant à réduire les inégalités (augmentation de la fiscalité sur les riches, abrogation des baisses d’impôt sur les revenus du capital,…) mais également sur une réforme de la santé et sur des mesures environnementales (lutte contre le réchauffement climatique).

D’ailleurs si son bilan a souvent été critiqué en raison de l’importance du taux de chômage (7,9%) en fin de mandat, qui se trouve d’ailleurs au même niveau que lors de sa prise de fonction (7,8%), il faut rappeler qu’Obama a été confronté dès son arrivée à une grave crise financière qui l’a contraint à prendre des mesures d’urgence (stimulus de 787Md€ en 2009). Pour autant, malgré un certain nombre de problèmes, Obama a bien mis en œuvre la réforme de la santé qui avait été son principal cheval de bataille en 2008, permettant la mise en place de la couverture maladie universelle aux Etats-Unis (« Obamacare »). Une réforme financière a également été menée avec la l’instauration du « Dodd-Frank Act » qui vise à donner une nouvelle réglementation au système financier (Règle Vocker qui limite les banques dans leurs opérations spéculatives). On peut donc difficilement reprocher à Obama de n’avoir rien fait pendant son premier mandat.

En revanche, il est sûr que depuis deux ans, les marges de manœuvre se sont considérablement réduites avec l’absence de majorité au Congrès et que le statu quo a prévalu. C’est probablement sur les questions environnementales et climatiques que le bilan peut paraître décevant. En début de mandat, « the American Clean Energy and Security Act », loi visant à lutter contre le réchauffement climatique et à faciliter la transition vers une économie propre, avait bien été votée à la chambre des représentants en juin 2009 mais n’avait pas été ratifiée par le Sénat. De plus, les dernières années ont été marquées par le fort développement du gaz de schiste1 , les impacts économiques en termes de coût de l’énergie et de créations d’emplois l’emportant sur les préoccupations écologiques.

Les principaux points du programme d’Obama cette année portent sur une réforme fiscale. En particulier, comme en 2008, il souhaite supprimer les baisses d’impôt pour les plus riches et augmenter les taxes sur les revenus du capital. Il est également en faveur d’une baisse du taux d’imposition des entreprises (de 35% à 28%) et de la « fermeture » de certaines niches fiscales2. D’ailleurs, le débat électoral a, en très grande partie, été dominé par la question des finances publiques (le déficit budgétaire était de 7% du PIB en 2012), en particulier par le choc fiscal de grande ampleur, auquel vont être confrontés les américains début 2013 en l’absence d’accord au Congrès (« fiscal cliff » de 600Md$ soit 4pts de PIB). Il est fort probable qu’un compromis soit trouvé aussi bien concernant le « fiscal cliff » que sur l’augmentation du plafond de la dette dans la mesure où ni les démocrates ni les républicains n’ont intérêt à ce que l’économie entre en récession. Pour autant, il est également vraisemblable que cela s’opère dans un climat agité et d’incertitude ayant un coût économique.

Si les enjeux à court terme sont importants – atténuer l’effet du « fiscal cliff » pour éviter une récession l’année prochaine – les challenges de moyen terme le sont également. En effet, les Etats-Unis ont besoin d’un programme de consolidation budgétaire sur le long terme, qui règle la question de la forte progression des dépenses dites « mandataires » (« mandatory spending »)3, recouvrant les programmes « social security, Medicare et Medicaid » qui vont être affectées par le vieillissement de la population et l’arrivée à la retraite des baby-boomers.

NOTES

  1. Cf. Flash n°2012-683 « La révolution du gaz de schiste aux Etats-Unis : bilan et perspectives ».
  2. Cf. SR n°2012-132 « Etats-Unis : Obama remporte un nouveau mandat, le Congrès reste divisé ».
  3. par opposition aux dépenses discrétionnaires dont le montant doit être approuvé tous les ans.

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