par Charlie Thomas, gérant du fonds Jupiter Global Ecology Growth chez Jupiter Asset Management
Le sommet sur le climat de New-York marque une étape importante dans la lutte contre le réchauffement climatique. Cependant les engagements concrets n’ont pas été à la hauteur des volontés politiques ostensiblement affichées. Il va donc falloir que les gouvernements enclenchent la vitesse supérieure s’ils ne veulent pas rester à la traîne de la société civile.
Le 23 septembre dernier s’est tenu le plus important rassemblement de dirigeants mondiaux pour évoquer le changement climatique depuis le Sommet de l’ONU de Copenhague en 2009. Même s’il ne s’agissait pas d’un rendez-vous formel s’inscrivant dans le processus officiel des négociations sur le sujet, le but de cette conférence était la mise en place d’un cadre qui permettrait aux membres de l’ONU d’atteindre l’objectif fixé par les accords de Copenhague, à savoir limiter le réchauffement climatique à 2 degrés Celsius.
Ce sommet marque pour beaucoup une étape importante dans la « Route vers Paris », pour faire un parallèle entre la conférence de l’ONU sur le changement climatique qui doit se tenir à Paris fin 2015 et le Tour de France. En poussant plus loin la métaphore, on peut dire qu’en cyclisme, les coureurs atteignent une cadence idéale: le rythme où la puissance du coureur pour pousser les pédales correspond à la résistance du vélo. L’idéal est que le coureur change de vitesse pour essayer de maintenir cet équilibre afin de s’adapter au terrain. Evidemment, dans la science du climat et la politique il y a beaucoup plus de variables à prendre en compte que dans le cyclisme. Quoiqu’il en soit, même si la volonté politique était très présente lors de ce somment, l’ambition a quant à elle fait défaut et les dirigeants n’ont, semble-t-il, pas enclenché la bonne vitesse pour surmonter les obstacles qui se présenteront inévitablement si l’on veut respecter les accords de Copenhague.
Ban Ki-Moon, qui a organisé ce sommet, a ostensiblement cherché à obtenir deux promesses : un plan strict de réduction des émissions de CO2 et un soutien financier. Il a obtenu très peu sur le premier point, un peu plus sur le second. Il y a malgré tout eu quelques surprises positives de la part des gouvernements. La plus concrète a été l’engagement de la France à verser 1 milliard de dollars au Fonds vert pour aider les pays en voie de développement à lutter contre le changement climatique. Les Etats-Unis et la Chine se sont également engagés à apporter leur soutien à un accord sur le climat, mais sans détails concrets. Le Vice-Premier Ministre chinois Zhang Gaoli a toutefois annoncé que les émissions de son pays atteindraient un pic aux environs de 2020. Enfin l’Union Européenne, les Etats-Unis et le Canada se sont mutuellement engagés à réduire de moitié la déforestation d’ici 2020 et à la stopper complètement d’ici 2030.
Le plus encourageant a cependant été l’implication croissante dont ont fait preuve les entreprises. Quelques uns des plus importants producteurs d’huile de palme se sont engagés à mettre fin à leur exploitation forestière d’ici 2030 et à reconstituer des zones importantes de forêt. Pour joindre le geste à la parole, le Rockefeller Brothers Fund (886 millions de dollars) a annoncé qu’il sortirait de ses investissements dans le charbon, le pétrole et le gaz naturel. Ce geste est d’autant plus emblématique que la fortune des Rockefeller s’est bâtie sur le pétrole et qu’il vient au moment où le Fonds Souverain Norvégien réfléchi à sortir des énergies fossiles. Selon nous, il est devenu de plus en plus clair que les entreprises et les individus n’attendent plus la mise en place d’un cadre politique généralisé pour reconnaître que le changement climatique est un enjeu des plus importants et leurs actions commencent à éclipser les politiques gouvernementales.
Du point de vue de la gestion de notre portefeuille, nous continuons à considérer ces négociations avec une certaine prudence. La frénésie qui a marqué les préparatifs du sommet de Copenhague nous a montré à quel point l’optimisme des marchés pouvait les déconnecter de la réalité. Heureusement, les marchés apprennent de leurs erreurs passées. Nous continuons donc de nous concentrer sur des entreprises proposant des solutions environnementales avec des fondamentaux solides, et dont les produits et services ont le potentiel pour concurrencer les offres classiques.