par Philippe Waechter, Directeur de la recherche économique chez Natixis AM
La Fed continue de penser que son taux d’équilibre de long terme s’ajuste encore à la baisse. Cela traduit une perception plutôt pessimiste de l’évolution tendancielle de l’économie américaine même si elle n’envisage pas de récession.
A court terme, elle pense néanmoins pouvoir remonter son taux de référence sans créer de dommage à l’économie. La Fed souhaite retrouver des marges de manœuvre dans la gestion de sa stratégie monétaire et c’est pour cela qu’elle remontera son taux en décembre de 25 bp (J’avais expliqué cela ) Mais cela ne préjuge en rien de ce qui sera fait en 2017.
Le message de la Fed est plutôt pessimiste à long terme puisque la valeur de long terme du taux des fed funds a encore été abaissée. Le taux de 2.9% est attendu dans le long terme contre 3% en juin dernier. La Fed croit de moins en moins que, dans les conditions actuelles, le scénario macroéconomique rebondira pour retrouver l’allure d’avant 2007. Elle s’inscrit dans un cadre de stagnation séculaire une croissance lente et une inflation réduite dans le long terme. La croissance nominale plafonne à 4% si l’on suit les prévisions de la Fed à l’horizon 2019. Avant 2007 elle évoluait entre 4 et 6%. C’est en raison de cette cassure dans l’allure du PIB nominal que le taux des fed funds est anticipé comme restant bas dans la durée.
Cela correspond à l’idée que le taux réel d’équilibre est plus faible. Cela traduit le changement de fonctionnement de l’économie et permet à la Fed de ne pas remonter son taux de référence de façon aussi importante que par le passé. Dis autrement elle n’aura pas besoin de le réduire autant que par le passé pour avoir un effet similaire sur la conjoncture. (pour ceux que cette thématique intéresse je vous recommande ce papier de la Fed et la critique de Krugman Sur le niveau des taux réels lisez ce bon document de travail de la Banque d’Angleterre).
Cependant, la Fed reste plutôt optimiste à court terme et voit l’activité s’améliorer en 2017 par rapport à 2016. C’est pour cela qu’elle veut en profiter et se donner des marges de manœuvre dans la gestion de sa politique monétaire. Les membres du comité de politique monétaire de la Fed envisagent très sérieusement la possibilité d’une remontée des taux en décembre de 25bp. L’intervalle du taux des fed funds passerait de [0.25; 0.50%] à [0.50; 0.75%].
Cela se perçoit dans les anticipations et c’est également inscrit dans le texte « The Committee judges that the case for an increase in the federal funds rate has strengthened but decided, for the time being, to wait for further evidence of continued progress toward its objectives » (italiques ajoutées par l’auteur).
Cette hausse des taux en décembre est probable et elle aura la même saveur que l’an dernier. La grande différence est que le guidage par la Fed sera nettement moins marqué que l’an dernier. Après la réunion de décembre 2015 et la hausse de 25 bp de l’intervalle d’évolution des fed funds, il était anticipé quatre hausses de taux en 2016. Cela avait perturbé le début d’année jusqu’à ce que Janet Yellen au début du mois de février n’indique que cela ne serait pas le cas. Cette fois ci le guidage sera nettement moins fort. Si l’on suit ce qui est dit en septembre seulement deux hausses sont attendues en 2017.
La Fed veut regagner des marges de manœuvre et retrouver ainsi la capacité à intervenir en cas de difficultés pour l’économie américaine. Elle remonte son taux de référence de façon réduite et avec une périodicité très faible (1 fois par an pour l’instant).
Sur le graphe on voit que la distribution pour chacune des dates se déplace vers la gauche. La hausse anticipé des taux se réduit, réunion après réunion. Cela s’observe de façon immédiate par le déplacement fort de la médiane de chaque distribution.