par Laurent Saltiel, CIO Emerging Markets Growth, et Sergey Davalchenko, Portfolio Manager Emerging Markets Growth chez AllianceBernstein
Après deux années d’excellentes performances, les actions des marchés émergents craignent de nouvelles menaces. Ces inquiétudes pourraient toutefois être exagérées, le profil de risque des marchés émergents continuant de se réduire sur le long terme.
Si l’on en croit les gros titres de la presse, des risques croissants planent sur les marchés émergents. La crise monétaire turque, les anticipations de hausse des taux d’intérêt américains et le raffermissement du dollar US sont considérés comme les principales menaces pour les pays en développement. Les tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine ont par ailleurs intensifié la nervosité ambiante. Après avoir bondi de 38 % au total en 2016 et 2017, le MSCI Emerging Markets Index a perdu 4,0 % (en euro) entre le 1er janvier et le 30 juin 2018. A l’échelle mondiale, les investisseurs ont sorti, en mai, 3,9 milliards de dollars des fonds d’actions des marchés émergents , inversant ainsi une séquence de 16 mois consécutifs d’apports dans ces fonds, selon des données publiées par Morningstar.
Cette panique est sans doute prématurée. Lorsque l’on regarde la situation à long terme, les fondamentaux macroéconomiques et boursiers offrent selon nous de bonnes bases pour permettre aux entreprises des marchés émergents de générer des résultats – et aux investisseurs de gagner en rentabilité.
La volatilité a diminué au sein des marchés émergents
Les risques inhérents aux marchés émergents, qui ont fait la une des journaux, déstabilisent les investisseurs, mais masquent au demeurant la diminution de la volatilité au sein des marchés d’actions des pays émergents. Dans le passé, ces derniers étaient plus volatiles que les marchés d’actions des pays développés, les investisseurs les percevant comme beaucoup plus risqués. Cela étant, le marché américain a connu un pic de volatilité cette année, alors que celle-ci restait relativement limitée au sein des marchés émergents (Graphique).
Pourquoi les choses ont-elles changé ? Regardons la composition de l’indice de référence. Sur les 10 dernières années, le poids des secteurs très cycliques, tels que l’énergie et les matières premières, a considérablement diminué au sein du MSCI Emerging Markets. Parallèlement, le secteur de la technologie est aujourd’hui celui qui pèse le plus lourd dans l’indice. Cette évolution a réduit la sensibilité économique et le profil de risque des actions des marchés émergents. Pourtant, le MSCI Emerging Markets se négocie à un multiple de capitalisation des bénéfices futurs de 11,3x, soit avec une décote de 26 % par rapport à l’indice des actions des pays développés. Cette situation indique que les investisseurs considèrent toujours les actions des pays en développement comme nettement plus risquées.
Améliorations significatives au niveau des déficits et de l’endettement
Cette perception est enracinée dans un historique qui pourrait bien être devenu obsolète. Dans le passé, la hausse des taux d’intérêt et du dollar US américains étaient effectivement préjudiciables pour les actifs des marchés émergents. Nous pensons toutefois que ces marchés sont aujourd’hui moins vulnérables aux chocs externes.