par William de Vijlder, Chef économiste de BNP Paribas
Les marchés actions ont encore connu de forts mouvements cette semaine. L’écart type des variations journalières du S&P500 sur une fenêtre mobile de 60 jours a grimpé en flèche et même si, en début d’année, cette envolée était encore plus grande, le graphique montre bien que 2018 est l’année du retour de la volatilité. En théorie, les causes sous-jacentes peuvent être diverses : les inquiétudes concernant les taux d’intérêt ou la croissance ou, tout simplement, les fluctuations de la prime de risque exigée. Ce dernier facteur peut refléter des variations de l’incertitude concernant les fondamentaux économiques (croissance de l’activité ou des bénéfices, taux d’intérêt) ou la politique économique (craintes protectionnistes), de l’évolution géopolitique, etc.
La détermination de la cause sous-jacente de la volatilité n’est pas sans importance : les incertitudes sur la croissance peuvent, en effet, se solder par un ralentissement de cette dernière tandis que celles sur les taux d’intérêt devraient avoir un impact plus limité sur la croissance ultérieure. Pour donner un meilleur éclairage, le graphique montre également la volatilité de la variation journalière de l’indice des obligations américaines à haut rendement.
Un ralentissement de la croissance entraîne une augmentation des défaillances de sorte qu’une hausse de l’incertitude sur la croissance devrait engendrer une remontée de la volatilité des obligations high yield. Qu’en est-il de l’incertitude sur les taux d’intérêt ? Le rendement des obligations high yieldest composé d’un « taux sans risque » (rendement des Treasuries) et d’une prime de risque (spreaddes obligations d’entreprises) ; par conséquent, les variations des anticipations de taux d’intérêt devraient se traduire par un accroissement de la volatilité des obligations high yield, que ce soit par le biais de la volatilité de la composante sans risque ou de la composante spread (les anticipations de resserrement monétaire peuvent finir par déclencher des inquiétudes relatives à l’augmentation des défaillances d’entreprises). La plupart du temps, la volatilité des actions et celle des obligations à haut rendement sont étroitement corrélées, laissant penser qu’elles sont imputables à des facteurs communs (perspectives de croissance et de taux d’intérêt, fluctuations de l’appétit pour le risque). Or, depuis le début de l’année, la hausse de la volatilité des obligations high yield est restée limitée relativement à celle des actions. Et cette déconnexion est encore plus nette depuis peu.
Ceci pourrait s’expliquer par :
- une complaisance des investisseurs en obligations d’entreprises (mais la question est de savoir pourquoi),
- les variations des perspectives de taux d’intérêt et de croissance ne sont pas le facteur à l’origine des mouvements des marchés actions,
- les investisseurs en actions sont très nerveux et tendent à surréagir aux données macroéconomiques par rapport aux investisseurs high yield,
- le comportement récent des bourses est dicté par des inquiétudes concernant les bénéfices d’entreprises individuelles et pas tellement par des développements macroéconomiques.