par Emmanuel Auboyneau, Gérant associé chez Amplegest
Nous vivons un paradoxe entre d’une part la réalité douloureuse des chiffres économiques et, d’autre part, un sentiment plus optimiste.
Le choc des statistiques économiques publiées récemment est un révélateur de l’ampleur de la crise. Le confinement a brutalement stoppé la croissance mondiale et fait plonger le monde dans une soudaine récession. Quelques chiffres illustrent cette réalité : l’explosion du chômage aux Etats-Unis, les prévisions de l’INSEE pour la croissance française au deuxième trimestre (-20% !) ou encore l’arrêt total du marché automobile en Europe.
Pourtant, en dépit de ces chiffres catastrophiques, force est de constater qu’une amélioration de l’environnement global se dessine petit à petit, symbolisée par la brusque remontée des marchés financiers. La pandémie du coronavirus serait sur le point de s’éteindre alors que les craintes d’une seconde vague s’atténuent.
Le secteur industriel est le premier à bénéficier de cette embellie avec une reprise en « V ». La Chine, qui a deux mois d’avance sur les grands pays occidentaux, a vu son industrie rebondir significativement depuis février. Les Etats-Unis sont au début de la remontée mais tout indique que le chemin sera identique. A ce titre, l’indice manufacturier de la FED de Dallas a repris dernièrement près de 20% sur ses points bas. Même l’Europe, souvent en retard, va dans le même sens. L’IFO allemand commence à remonter et les perspectives personnelles de production sont en forte hausse en France.
Ces signaux positifs doivent être confirmés et dépendent bien sûr de l’évolution de la pandémie dans le monde. Ils préfigurent toutefois d’une reprise globale de l’économie mondiale au second semestre, de sorte que la récession aura été violente, mais brève. Cette embellie probable est favorisée par la réaction forte, rapide et coordonnée des autorités politiques et monétaires en Asie, aux Etats-Unis et en Europe. Notre continent a souvent donné une image discordante et le sentiment d’être constamment en retard lors des crises précédentes (notamment en 2008). Le plan de relance de 750 milliards d’euros annoncé par Ursula Von der Leyen, qui doit encore être approuvé et fera sans doute l’objet d’un compromis, va dans le bon sens, sans parler de la proactivité de la Banque Centrale Européenne. Ces évènements pourraient au final se traduire par davantage d’intégration là où d’aucuns annoncent une fois de plus la fin de la zone euro.
Une reprise des services plus aléatoire
La seconde étape de la reprise économique sera celle d’un rebond de la consommation et des services. Elle sera plus progressive et demeure incertaine. Le tourisme, les loisirs et la restauration ne pourront vraiment reprendre qu’avec la certitude que cet épisode sanitaire est derrière nous. Une reprise en « U » est de ce fait plus probable.
La hausse récente des marchés financiers doit être mise en perspective avec le krach de mars. Le soutien des banques centrales, l’absence de rendement des actifs sans risque et une communication globalement moins négative que prévu des entreprises, ont été les catalyseurs de ce mouvement. La Bourse, comme souvent, ne regarde pas le présent mais anticipe le futur qu’elle entrevoit meilleur. Ce sont d’abord les secteurs les moins touchés par la crise qui ont rebondi (valeurs technologiques, grandes sociétés de croissance). Les secteurs value (industrie, tourisme, banques…) restent sur des niveaux très bas même s’ils semblent repartir depuis quelques jours. Nous avons tenu nos positions dans les portefeuilles et profitons de cette remontée récente.