par Jim Lydotes, Gestionnaire de portefeuille chez Mellon
Alors que l'économie américaine est soumise à une pression soutenue et que les conditions du marché s'apparentent à celles des années 1930, le moment serait-il venu de mettre en œuvre un "New Deal" à la Roosevelt pour stimuler l'économie et renouveler les infrastructures nationales ?
Il y a douze mois à peine, peu de gens auraient pu prédire la crise à laquelle l'économie américaine est actuellement confrontée. Les effets dévastateurs du coronavirus et l'effondrement des prix du pétrole ont plongé certaines parties de l'économie dans des conditions de ralentissement sans précédent depuis la grande dépression. Avec plus de 40 millions d'Américains au chômage et un ménage sur cinq en situation d'insécurité alimentaire1, l'économie américaine se trouve confrontée à de graves difficultés.
La réponse du gouvernement a été significative. En mars, le Sénat a adopté un plan d'aide d'urgence de 2 milliards de dollars et la Réserve fédérale américaine a agi en réduisant les taux d'intérêt à zéro, en relançant l'achat d'actifs à grande échelle et en lançant de nouvelles initiatives – parfois jusqu'à une par semaine2. Tout cela a conduit certains à spéculer sur le fait que les États-Unis pourraient être sur le point de faire face à l'introduction à grande échelle d'un New Deal3 pour stimuler l'économie nationale et remettre l'Amérique au travail. Le New Deal initial n'était rien d'autre qu'un pacte axé sur les infrastructures. La Works Progress Administration (WPA) créée par l'administration Roosevelt a notamment construit 650 000 miles de routes, 78 000 ponts, 125 000 bâtiments civils et militaires, et a construit ou amélioré 800 aéroports4.
Un soutien de taille
L'administration américaine peut-elle vraiment réitérer l'ampleur de cette réussite en investissant elle-même dans de grandes infrastructures ? Bien que la question reste entière, le gérant de portefeuille de Mellon, Jim Lydotes, espère que certains nouveaux projets d'infrastructures majeurs pourraient être liés aux conséquences économiques de la pandémie. Son optimisme provient en partie du fait que, malgré les profondes divisions politiques aux États-Unis, le renouvellement des infrastructures est un domaine qui bénéficie d'un large soutien de la part de tous les partis.
"Le développement des infrastructures est un domaine qui a tendance à bénéficier d'un soutien bipartite aux États-Unis. Les principaux partis politiques américains s'accordent essentiellement sur le fait que les ponts, les routes, les aéroports ont été sous-investis pendant longtemps et que les dépenses d'infrastructure sont susceptibles de stimuler l'économie en cette période difficile".
Une large partie des infrastructures routières américaines sont particulièrement mal en point. Selon certaines estimations, jusqu'à 25 % des ponts américains ont besoin d'être modernisés et 64 % des routes américaines ont également besoin d'être réparées5. Il exsite un potentiel important d'investissement dans les infrastructures, non seulement dans les routes et les ponts, mais aussi dans des domaines tels que les aéroports et les réseaux de transmission d'électricité.
"Les routes américaines pourraient bénéficier de manière significative d'un nouvel entretien. Le pays a également sous-investi dans les infrastructures aéroportuaires et pourrait utiliser des fonds pour moderniser ces installations".
"Il existe également un important potentiel d'investissement dans les systèmes de réseaux électriques. Les États américains ont tendance à disposer de leurs propres réseaux de distribution locaux et sont donc gérés de manière décentralisée – ce qui peut conduire à de graves inefficacités. Nous pensons qu'il est possible d'investir, de rationaliser et d'améliorer ce système".
Les services publics réglementés pourraient bénéficier de toute poussée d'investissement dans les infrastructures et il existe un potentiel prometteur dans l'application plus large des énergies renouvelables telles que l'énergie solaire et éolienne. "Les services publics peuvent gagner plus d'argent en augmentant leur base d'actifs. Bien qu'il soit normalement difficile d'y parvenir, tout nouvel investissement majeur dans les énergies renouvelables provenant de dépenses d'infrastructure plus importantes pourrait accroître les actifs dont ils peuvent tirer un rendement. Tout effort visant à accélérer la croissance des énergies renouvelables devrait permettre à ces services publics de croître plus rapidement et pourrait également conduire à des multiples plus élevés pour ces entreprises, les investisseurs récoltant les bénéfices de cet investissement".
Que le gouvernement américain décide ou non de financer une refonte majeure des infrastructures après les prochaines élections américaines, il existe toujours un large soutien en faveur du renouvellement des infrastructures, tant au niveau politique que public. "Étant donné l'état de délabrement chronique des infrastructures américaines et la volonté apparemment inépuisable du gouvernement américain de stimuler l'économie par des dépenses fiscales, nous pensons que ce sera à nouveau le seul domaine sur lequel les deux principaux candidats seront d'accord. "Alors que nous commençons à regarder au-delà de la pandémie de Covid-19, et que le chômage devrait être de plus en plus élevé, il ne fait aucun doute que de plus en plus de gens parlent à nouveau d'infrastructures et du potentiel d'un programme de New Deal pour les travaux publics et les investissements".
NOTES
- Guardian.Jobless America: the coronavirus unemployment crisis in figures. 28 May 2020.
- Bloomberg Explainer. What the Federal Reserve has done in the coronavirus crisis. 09 April 2020.
- Express. Coronavirus breakthrough: How Trump could emulate FDR’s New Deal to rebuild US economy. 06 April 2020.
- American-made. The enduring legacy of the WPA when FDR put the nation to work. 24 February 2008.
- CNN Business. S&P US chief economist