Zone euro : la vrai danger

Après la Grèce, c’est donc au tour de l’Irlande d’être au cœur de la tourmente financière dans la zone euro.

Après la Grèce, c’est donc au tour de l’Irlande d’être au cœur de la tourmente financière dans la zone euro. Et les investisseurs lancent déjà les paris : qui sera le prochain ? Le Portugal ? Ensuite l’Espagne ? Puis l’Italie ou peut-être plutôt la France ? Tant que les responsables politiques n’auront pas pris les mesures qui s’imposent la zone euro sera en danger.

Le problème de l’Irlande est similaire à celui de la Grèce : après plusieurs années d’argent « bon marché » – avec des taux d’intérêt réels négatifs – qui ont dopé la croissance mais aussi l’endettement, les deux pays ont subi de plein fouet la crise économique et financière, devant résoudre des questions de liquidités (en clair le remboursement des échéances) et de quasi-insolvabilité du secteur bancaire.

En échange d’une aide extérieure, l’Irlande, dont le déficit public représente presque 32% du Produit intérieur brut (PIB) en 2010 suite au renflouement des banques, a dû annoncer un plan visant à économiser 15 milliards d’euros sur quatre ans (2011-2014).

Le gouvernement va supprimer des milliers de postes dans la fonction publique, réduire les aides sociales et relever le taux de la TVA. Mais, l’Irlande a exclu de toucher à sa très avantageuse fiscalité des entreprises. Le taux de l’impôt sur les sociétés n’est que de 12,5%, soit la moitié de la moyenne de l’Union européenne. C’est la raison pour laquelle l’Irlande est souvent accusée de « dumping fiscal ».

Et c’est là qu’on touche aux limites de la politique de la zone euro. Les dirigeants européens ont mis en place la monnaie unique en estimant que cette seule décision aurait un effet formidable sur l’intégration économique, budgétaire, sociale et fiscale.

Cette idée est tellement ancrée que la Banque centrale européenne (BCE) n’évoque jamais les pays en particulier, préférant se contenter d’une moyenne européenne aussi chimérique que dangereuse. Car, la politique monétaire est la même pour tous alors que les situations sont hétérogènes. L’intégration n’existe peut-être qu’entre l’Allemagne et les pays du Benelux (Pays-Bas, Luxembourg et Belgique).

« Une politique unique pour des pays aussi différents (que ceux de la zone euro), ce n’est pas possible », juge ainsi Philippe Delienne, président de la société de gestion Convictions AM.

Si l’Union européenne se contente de proposer des mesures ponctuelles et limitées (pourquoi refuse-t-elle d’imposer une restructuration de dette aux mauvais élèves ?) à chaque crise, la zone euro ne survivra pas.

Pour plusieurs économistes, il faut impérativement un mécanisme prévoyant des sanctions automatiques pour les pays qui ne respectent pas les règles communes. Lesquelles règles communes doivent dépasser le seul cadre budgétaire pour intégrer des critères fiscaux et politiques voire également sociaux.

Est-il normal que l’Irlande ait pu obtenir des aides structurelles européennes pour sortir de son sous-développement et que ce pays ait décidé de jouer sa carte en proposant aux multinationales une fiscalité qui pénalisait clairement ses partenaires européens ? Est-il normal que la Grèce ait un taux de recettes publiques sur PIB de 37,8% sachant que ce taux montre que l’Etat ne récupère pas tous les impôts nécessaires à son bon fonctionnement ? Est-il normal que la France n’ait jamais pu présenter un budget équilibré depuis 30 ans alors que même l’Italie souvent critiquée ici y est parvenue ?

Bref, les crises qui ont frappé la Grèce puis l’Irlande et qui menacent aujourd’hui le Portugal et l’Espagne doit sonner le réveil des dirigeants européens. La construction européenne est l’acquis majeur du Vieux continent depuis la fin de la Seconde guerre mondiale. Si rien n’est fait pour obtenir une vraie intégration économique et politique, cet acquis risque de disparaître.