par Thomas Chavet, Investment Specialist chez CPR AM
L’industrie des technologies médicales a été un acteur majeur et central pendant la crise de la Covid-19. La nécessité de créer de la distance physique entre le corps médical et les patients a incité les acteurs de la MedTech à améliorer la manière dont leurs appareils sont utilisés. Les dirigeants affirment qu’ils vont continuer à intégrer de nouvelles fonctionnalités en accélérant et en étendant les capacités technologiques qui deviendront des offres permanentes. M. Ford, CEO de la Société Abbott Laboratories, estime d’ailleurs que les avantages de la MedTech vont au-delà de la Covid-19 : « Elle peut vraiment réduire le temps de réponse, diminuer les problèmes logistiques, les défis liés au rendez-vous physique et peut finalement conduire à une réduction des coûts de santé ».
Même son de cloche chez plusieurs autres leaders du marché de la MedTech. Geoff Martha (CEO de Medtronic) a déclaré que les progrès liés à ces évolutions technologiques sont déjà visibles avec entre autres « l’ajout de capacités avancées aux dispositifs de rythme cardiaque, aux pompes à insuline pour diabétiques et aux respirateurs ». Mike Mahoney, CEO de Boston Scientific, a quant à lui indiqué que « la société a « tiré parti de la Covid » pour accélérer ses investissements et ses capacités numériques dans des domaines tels que les essais cliniques, l’engagement des clients, les solutions mobiles, l’éducation médicale et l’assistance à distance.»
Au cœur même de la bataille contre le virus, les sociétés de diagnostic ont joué un rôle essentiel en fournissant des respirateurs, des masques ainsi que des tests de dépistage qui d’ailleurs resteront au centre de l’attention pendant les prochains trimestres, voire les prochaines années. En effet, la campagne vaccination mondiale de masse prenant du temps, les tests continueront probablement de jouer un rôle important dans la compréhension de l’efficacité et de la durabilité des vaccins. Dans ce contexte, le test est de plus en plus intégré dans notre vie quotidienne, que ce soit pour les protocoles de voyage, le dépistage médical ou encore la pratique pré-chirurgicale, pour ne citer que quelques-uns de ses usages.
La société moderne, un moteur indissociable de la MedTech
Nous sommes actuellement dans un contexte démographique favorable à l’essor de la technologie dans le domaine médical. Il est d’abord caractérisé par un accroissement rapide de la population mondiale. Nous devrions être plus de 10 milliards en 2050 d’après les estimations (source : ONU). La population augmente, et elle vieillit : il y a 100 ans l’espérance de vie était de 34 ans, elle est dorénavant de 72 ans. Ces deux phénomènes nous exposent à de nouvelles pathologies. Par exemple, le vieillissement démographique va de pair avec l’augmentation des maladies chroniques.
L’urbanisation est par ailleurs en cause. Un style de vie plus sédentaire, de mauvaises habitudes alimentaires et la pollution favorisent la hausse de ces pathologies. D’après l’OMS, les maladies chroniques représentent 63% des décès mondiaux et touchent un tiers de la population française, avec une augmentation des cas de près de 17% dans les 10 prochaines années.
De plus, la tendance au niveau mondial est incontestablement à une moyennisation des pays émergents et une relative « démoyennisation » des pays riches. L’Europe, qui rassemblait en 2009 le tiers de la classe moyenne mondiale, ne devrait plus en réunir que 14 % en 2030, tandis que l’Asie, après avoir été l’usine du monde, en représentera 66 %. Or cette classe moyenne dans les pays émergents aspire à un meilleur accès aux soins. A titre d’exemple, la Chine a en 2019 inclus la télémédecine dans son système d’assurance maladie, encourageant de ce fait l’adoption de tels services.
Les moteurs historiques de la MedTech
De manière plus générale, le secteur des technologies médicales est axé sur la recherche et le développement. En y consacrant 8 % de son chiffre d’affaires, soit plus de trois fois la moyenne mondiale du MSCI World, le secteur des technologies médicales crée les conditions idéales pour une rentabilité et une croissance fortes.
Par ailleurs, les fusions et acquisitions sont pour le secteur un moteur structurel qui lui permet de s’adapter très rapidement à de nouveaux domaines, de nouvelles technologies et de nouveaux besoins. Les grandes entreprises cherchent à étendre leur gamme de produits en achetant des petites sociétés innovantes, lesquelles de leur côté ne disposent pas des forces de marketing suffisantes pour faire concurrence aux premières et vendre efficacement leurs propres produits.
Alors que les fusions et acquisitions ont ralenti en 2020 du fait de la pandémie, le marché s’attend à un rebond (John Babbitt, EY’s MedTech leader for the Americas) des accords en 2021. En témoignent déjà les 26 milliards d’euros qu’ont atteints les opérations au cours du troisième trimestre 2020, un montant bien supérieur aux 2 milliards d’euros totalisés au premier trimestre de la même année. Les entreprises sont armées d’une puissance de feu financière record d’environ 500 milliards de dollars. La performance des entreprises devrait s’améliorer à mesure que les acquisitions reprennent et que l’impact de la pandémie diminue.
Au-delà de 2021, le flux d’innovations ne tarit pas, bien au contraire. Machine Learning et Intelligence Artificielle fournissent de meilleures prévisions, très en amont des pathologies, pour une meilleure prévention. Digitalisation, miniaturisation, téléconsultations, biopsie liquide (recherche d’ARN et d’ADN tumoral dans une prise de sang), … les recherches en cours sont tout simplement vertigineuses, les progrès à en attendre spectaculaires et les perspectives enthousiasmantes. La médecine de demain se prépare dans les laboratoires de la MedTech, et elle n’aura plus rien à voir avec celle d’hier.