par William De Vijlder, Group Chief Economist chez BNP Paribas
Le Pacte de stabilité et de croissance (PSC) – pilier budgétaire de l’Union économique et monétaire applicable à l’ensemble des pays membres sans exception – a été adopté en 1997, et a été amendé à plusieurs reprises depuis. Bien qu’il s’agisse d’un ensemble complexe de règles, le débat public qui s’y rapporte tend à se concentrer sur les critères de Maastricht, à savoir un déficit budgétaire limité à 3% du PIB et une dette publique qui ne doit pas excéder 60% du PIB.
À en juger par la performance annuelle des États membres de l’UE dans ces deux domaines, il apparaît clairement que ces objectifs, très souvent, n’ont pas été atteints (graphique). C’est particulièrement vrai à l’heure actuelle. La pandémie de Covid-19 a, en effet, nécessité d’importants efforts budgétaires de la part des pays membres, ce qui a entraîné l’activation en mars 2020 de la clause dérogatoire générale. Celle-ci a permis aux pays de s’écarter des trajectoires budgétaires définies avant la crise du Covid-19. Or, le rétablissement du PSC est prévu en 2023[1], ce qui rend nécessaire l’évaluation et, éventuellement, une révision des règles budgétaires.
Elle s’inscrira dans le cadre d’un réexamen global de la gouvernance économique de l’Union européenne, récemment relancé par la Commission européenne. Cette initiative rencontre de multiples défis. Premièrement, la difficulté de trouver un équilibre entre les besoins d’investissement public – qui resteront élevés pendant des années en raison de la transition verte et numérique – et la nécessité de réduire les déficits budgétaires afin que les États disposent d’une marge de manœuvre suffisante pour mener une politique budgétaire discrétionnaire contra-cyclique lorsque la prochaine récession aura lieu. Deuxièmement, l’ordre du jour est particulièrement large car il couvre un grand nombre de sujets, regroupés en 11 questions ouvertes[2]. Troisièmement, le processus de réexamen sera fondé sur un débat inclusif réunissant de nombreux intervenants. Ce débat devrait être bien accueilli, mais il pourrait néanmoins réduire le temps disponible pour parvenir à un accord politique.
Inviter les citoyens et les organisations à contribuer au débat n’est pas sans rappeler les événements « La BCE à votre écoute » organisés par la banque centrale dans le cadre de la préparation de sa revue stratégique. Toutefois, le débat portant sur la gouvernance économique et budgétaire est beaucoup plus complexe que celui sur la stratégie de politique monétaire, le premier présentant une importante dimension distributionnelle – niveaux d’imposition, transferts de revenus, dépenses – ainsi qu’un aspect intertemporel (conditions de viabilité de la dette). Enfin, en ce qui concerne la gouvernance budgétaire, les États membres de l’UE devront trouver un équilibre entre discipline de la politique économique et maintien d’une marge de manœuvre budgétaire au niveau national. Dans sa liste de 11 questions, la Commission européenne aborde le rôle possible des sanctions financières, des atteintes à la réputation et des mesures d’incitation. C’est probablement la question la plus difficile à aborder et celle pour laquelle il sera particulièrement ardu de parvenir à un accord. Toutefois, compte tenu de l’état des finances publiques dans la plupart des pays de l’UE, des règles budgétaires raisonnables sont indispensables pour recréer progressivement la marge de manœuvre budgétaire indispensable aux États membres.
[1] EU to keep its borrowing limits suspended in 2022, restore them in 2023, Reuters, 2 juin 2021.
[2] Les questions concernent les points suivants : Comment garantir la viabilité des finances publiques, aider à corriger les déséquilibres macroéconomiques existants et à prévenir l’apparition de nouveaux ? Comment garantir des politiques budgétaires responsables qui préservent la viabilité à long terme, tout en permettant une stabilisation macroéconomique à court terme ? Comment inciter les Etats membres à entreprendre les réformes et investissements clés nécessaires pour concrétiser les ambitions du pacte vert pour l’Europe et pour relever les défis économiques, sociaux et environnementaux tout en conservant des garde-fous contre les risques pesant sur la soutenabilité de la dette ? Comment simplifier le cadre de l’UE et améliorer sa transparence ? Comment concentrer la surveillance sur les Etats membres confrontés aux défis stratégiques les plus pressants ? En quoi la conception, la gouvernance et le fonctionnement de la facilité pour la reprise et la résilience (FRR) peuvent-ils fournir des enseignements utiles en matière de gouvernance économique ? Est-il possible de renforcer les cadres budgétaires nationaux et d’améliorer leur articulation avec le cadre budgétaire de l’UE ? Comment le cadre peut-il garantir une application efficace et quel devrait être le rôle des sanctions financières, des coûts de réputation et des incitations positives ? Comment le cadre peut-il assurer une réponse adéquate et coordonnée au niveau national et au niveau de l’UE ? Comment devrait-il prendre en compte la dimension « zone euro » et le programme d’approfondissement de l’Union économique et monétaire ? Le cadre de gouvernance économique devrait-il prendre en compte des défis autres que ceux déjà recensés ? (Source : Questions/réponses : la Commission relance le réexamen de la gouvernance économique de l’UE, Bruxelles, 19 octobre 2021).
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