Pourquoi déclencher une récession ?

Tout dirigeant politique arrivant au sommet d’un État démocratique se considère comme un génie. Surtout quand il est élu directement par le suffrage universel. N’a-t-il pas su convaincre plus de la moitié des électeurs de le choisir ? Comment ne pas imaginer alors que l’on a la science infuse et qu’on sait traiter tous les problèmes, y compris les plus complexes ?

Donald Trump, héritier d’une entreprise de promotion immobilière qu’il a failli couler avant l’intervention miraculeuse de banques dans les années 1990, a bâti sa carrière politique en s’inspirant des méthodes des populistes : proclamer vouloir rendre sa grandeur à son pays et apparaître comme un homme fort. Élu pour un deuxième mandat en novembre 2024, il s’est mis en tête de démanteler l’appareil administratif des États-Unis et de déclarer la guerre commerciale à quasiment toute la planète avec la promesse de rebâtir une nouvelle économie quasi-autarcique et prospère.

Ces mesures surprenantes pourraient provoquer une récession aux États-Unis, sachant que, de manière inattendue, l’économie s’est déjà contractée de 0,3% au premier trimestre. Trump n’exclut plus une récession : « Tout peut se passer », a-t-il reconnu lors d’un entretien sur NBC. Fidèle à son personnage de fanfaron, il a ajouté : « Mais je pense que nous allons avoir la plus grande économie de l’histoire de notre pays. Je pense que nous allons observer le plus grand boom économique de l’histoire. »

Concrètement, les droits de douane imposés sans discernement vont avoir deux effets : déclencher des représailles de la part des pays visés (la Chine et le Canada ont déjà riposté alors que l’Union européenne temporise) et renchérir le prix des biens importés aux Etats-Unis car les entreprises ont déjà prévenu qu’elles répercuteraient le coût de la taxe aux consommateurs. L’inflation était encore de 2,3% en mars et cela pourrait progresser fortement dans les prochains mois. C’est la raison pour laquelle la Réserve fédérale ne compte pas réduire ses taux d’intérêts, en dépit des récriminations du chef de la Maison Blanche, qui a menacé de révoquer le président Jerome Powell.

La corrélation entre droits de douane et inflation est bien documentée depuis très longtemps. Trump a sans doute parié que le prix du pétrole (désormais sous les 60 dollars le baril) baisserait suffisamment pour convaincre les Américains que les choses se passeraient bien. D’autant qu’il a tendance à mentir et à brouiller les pistes en mélangeant prix de gros et prix de détail.

A cette situation, il y a un troisième élément pouvant favoriser une récession : les licenciements massifs opérés par Elon Musk et son DOGE dans l’appareil administratif fédéral. Quelque 222.000 emplois gouvernementaux ont déjà été supprimés au nom de la chasse au gaspi, le milliardaire propriétaire affirmant, sans preuve, avoir économisé 150 milliards de dollars.

Ces licenciements vont peser sur la confiance des consommateurs et donc leurs dépenses, vont contribuer à la remontée du chômage et auront donc un impact négatif sur la croissance économique à moyen terme.

Tous ces éléments ont été étudiés par les économistes, de tous bords. La question est : pourquoi Trump a-t-il décidé de détruire la confiance dans son pays et dans le reste du monde ?