Etats-Unis : l’anguille sous la roche

par Hélène Baudchon, économiste au Crédit Agricole

  • Les créations nettes d’emplois non agricoles se sont limitées à 103000 en décembre, mais le taux de chômage a reculé à 9,4%.
  • Le climat des affaires en décembre s’est un peu amélioré dans le secteur manufacturier et beaucoup dans les services.
  • D’après les Minutes du FOMC du 14 décembre, la barrière est haute pour modifier le QE2.

 

Les chiffres d’emploi en décembre ont pour le moins réservé des surprises. Alors que la prévision ADP de 297 000 créations nettes d’emplois salariés privés avait suscité d’importantes attentes (malgré l’anomalie), celles-ci ont été douchées par le chiffre officiel du BLS de seulement 103 000 créations (113 000 dans le privé à périmètre comparable). A retenir que ce chiffre est bien plus en ligne avec les autres indicateurs du marché du travail, en particulier les composantes « emplois » des enquêtes ISM. La révision en hausse des créations d’emplois en octobre et novembre vient néanmoins quelque peu compenser le petit chiffre de décembre. En fait, les 297 000 créations de l’ADP se retrouvent dans la série d’emploi total issue de l’enquête auprès des ménages. Combinée à une nouvelle contraction de la population active, cela explique l’importante baisse inattendue du taux de chômage à 9,4%. Les deux séries étant notoirement volatiles, la rapidité de ce recul n’est pas représentative de la tendance.

Le signal combiné de la nouvelle légère hausse en décembre de l’enquête ISM sur le climat des affaires auprès du secteur manufacturier (de 56,6 à 57) et de la hausse marquée de la même enquête auprès des secteurs non manufacturiers (de 55 à 57,1) est particulièrement encourageant, car il conforte les chances d’un mouvement auto-entretenu. Du côté du secteur manufacturier, la hausse des composantes « nouvelles commandes » et « production » contre-balance aisément la baisse des composantes « emplois » et « stocks ». Tout en sachant que ce secteur n’est pas représentatif de l’ensemble de l’économie, à ce niveau, l’indice ISM est tout de même compatible avec une croissance du PIB de 5%. Du côté des secteurs non manufacturiers, la remontée de l’indice est remarquable (plus haut niveau depuis mars 2006) et en ligne avec le rebond des ventes au détail au cours des derniers mois.

Les Minutes du FOMC du 14 décembre ont apporté quelques précisions intéressantes sur le débat sur la taille ultime du QE2. On y apprend que l’apparente amélioration des perspectives de croissance et d’inflation n’a pas été considérée suffisante pour entraîner un ajustement du programme d’achats. Les membres du FOMC ont besoin de plus de temps pour accumuler plus d’information avant de pouvoir trancher. Pour certains, la barrière à franchir pour procéder à des changements est élevée. Certes, l’existence de risques haussiers sur la croissance est dûment mentionnée et, plus important, plusieurs participants sont d’avis que le risque de déflation aurait quelque peu diminué au cours des derniers mois. Cependant, les risques baissiers sur la croissance et l’inflation restent nombreux et importants. Concrètement, ce qui compte pour la Fed, c’est la vitesse des progrès en direction de ses objectifs de plein emploi et de stabilité des prix. Or ceux-ci devraient rester lents (et le rapport sur l’emploi de décembre va en ce sens) alors même que le chemin à parcourir est long.

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