Bonne année

par Caroline Newhouse-Cohen, économiste chez BNP Paribas

L’année 2011 débute sur les marchés avec une note d’optimisme. De part et d’autre de l’Atlantique, les dernières enquêtes et données économiques publiées traduisent une activité dynamique et écarte progressivement l’hypothèse du « double dip » aux Etats-Unis. Certaines ombres, comme le creusement des performances au sein de n’en demeurent pas moins au tableau. Elles conduisent à rester prudents.

Aux Etats-Unis, l’indice ISM manufacturier, à 57,0 en décembre, suggère une croissance soutenue de l’activité dans le secteur manufacturier en fin d’année. La croissance du PIB devrait être supérieure à 2,5% en rythme trimestriel annualisé au T4 2010, après 2,5% au T3. En moyenne annuelle, après 2,8% en 2010, elle devrait ralentir en 2011 autour de 2,5%.

L’économie des Etats-Unis continue à bénéficier d’un policy-mix particulièrement accommodant. D’une part, depuis l’introduction de la deuxième vague d’assouplissement monétaire(1) (QE2) en novembre, la Réserve fédérale a confirmé son biais monétaire. Elle estime que la reprise ne permet pas encore de faire reculer le chômage et signale que l’inflation sous-jacente continue de se replier. D’autre part, le compromis budgétaire de l’Administration Obama(2) devrait avoir un impact positif, bien que limité, sur l’économie. En effet, au vu des estimations du Joint Committee on Taxation, seuls 72 milliards de dollars par an en 2011 comme en 2012 apporteront une impulsion supplémentaire à l’activité, alors que le prolongement jusqu’en 2012 des mesures déjà en vigueur constitue plus de 80% de l’enveloppe totale.

Dans la zone euro, les nouvelles sur le front économique demeurent favorables en ce début d’année, mais pas partout. Ainsi, l’indice du climat économique (ESI), qui est un bon indicateur avancé de la croissance du PIB, a-t-il bondi de 105,1 en novembre à 106,2 en décembre. Son niveau est cohérent au quatrième trimestre avec une progression du PIB de l’ordre de 0,5% t/t sur la période.

Pourtant, les situations économique et financière restent particulièrement hétérogènes au sein de la zone euro. En Italie, l’ESI progresse mais demeure sous sa moyenne de long terme, alors qu’il recule en Espagne et signale une contraction sérieuse de l’activité en Grèce. Ces pays sont confrontés à un long et difficile processus d’ajustement économique en vue de corriger les déséquilibres passés (épargne privée et / ou publique trop faibles, investissement immobilier trop fort…). Ils se préparent, en conséquence, à une reprise lente, insuffisante pour faire baisser le chômage dans l’immédiat.

A cet égard, l’économiste en chef du FMI, Olivier Blanchard, avait affirmé en fin d’année que, outre la Grèce ou l'Irlande, d'autres pays européens auraient intérêt à se faire aider par le Fonds et l'Union européenne. Il estimait, d’une part, que de tels programmes leur permettraient de fixer un taux d'intérêt plafond sur leur dette et par là même d’en faciliter le remboursement (rappelons que les programmes d’émission de dette souveraine vont être chargés au premier trimestre(3), alors même que de nombreuses tensions subsistent). D’autre part, M. Blanchard considère que ces programmes d’aide renforceraient la crédibilité des engagements nationaux de consolidation des finances publiques et rassureraient ainsi les marchés.

Le renforcement de l’Union européenne s’impose comme la seule réponse crédible pour faire face à la crise que traverse la zone. La réunion des ministres européens des Finances à Bruxelles devrait donner l’occasion à la France de présenter son projet de gouvernance économique, s’articulant autour de l’axe franco-allemand et la convergence économique et fiscale des deux pays à l’horizon de 2020. Berlin, de son côté, avance l’idée d’un "fonds européen de stabilité, de croissance et d'investissement" indépendant, inspiré du FMI. Il pourrait aider en urgence des Etats de la zone. Il disposerait d’une "capacité illimitée de refinancement", et son aide serait strictement conditionnée.

NOTES

  1. La nouvelle cible d’achat de titres du Trésor a été fixée à USD 600 mds supplémentaires d’ici à la fin du premier trimestre, soit environ 75mds par mois. Par ailleurs, le FOMC avait décidé que le programme resterait flexible, sa taille comme le rythme d’achats pourront être régulièrement révisés.
  2. Maintien jusqu'à la fin 2012 des allègements fiscaux pour tous les ménages, y compris les plus aisés ; extension, jusqu'à la fin 2012, de plusieurs crédits d’impôt à destination des ménages peu aisés – Child tax credit, Earned income tax credit, College tax credit.
  3. Les émissions brutes de dette souveraine de la zone euro devraient s'élever en 2011 à EUR 826 mds, à comparer à EUR 954 mds en 2010. Près de 30 % de ces capitaux seront levés dans le courant du T1 et 9,5 % en janvier.

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