par Nathalie Dezeure, économiste chez Natixis
A la veille de l’ouverture des Jeux Olympiques de Londres, le PIB britannique affiche de biens mauvais records. La publication de la première estimation du PIB du deuxième trimestre a ainsi révélé une baisse du PIB de 0,7% T/T, la plus forte depuis début 2009, signant ainsi la plus longue « double récession » jamais enregistrée.
Certes 2012 constitue une année particulière, avec la succession d’événements exceptionnels affectant la trajectoire de la croissance. Ainsi, au deuxième trimestre, les célébrations liées au jubilé de diamant de la Reine, avec l’octroi d’un jour férié supplémentaire, ont amputé la croissance mais l’office statistique indique qu’il n’est pas possible, à ce stade, de quantifier leur impact (une analyse rétrospective sera effectuée). Au troisième trimestre, les Jeux Olympiques de Londres devraient avoir un effet inverse et permettre de sortir le Royaume-Uni de la récession. Cela n’empêchera toutefois pas le PIB britannique de reculer sur l’ensemble de l’année 2012 alors que l’acquis de croissance à l’issue du deuxième trimestre 2012 est d’ores et déjà de -0,8%.
Au-delà des événements exceptionnels, l’absence de reprise durable de la demande devrait continuer de freiner l’activité britannique pendant encore plusieurs trimestres. En effet, côté demande intérieure, les dépenses de ménages devraient rester limitées (la consommation des ménages représente 60% du PIB et l’investissement résidentiel 5%) alors que ces derniers restent confrontés à une situation délicate caractérisée par un taux de chômage élevé (qui risque de ré- augmenter après la fin des Jeux olympiques), des conditions d’emploi difficiles, une faible hausse des salaires et la poursuite du désendettement dans un contexte de forte aversion au risque. Côté exportations, le ralentissement de la croissance mondiale et plus particulièrement la crise de la zone euro pèsent sur les perspectives des prochains trimestres.
Dans ce contexte et alors que le PIB est désormais inférieur de 0,2% à son niveau de T2 2010 (soit au moment de l’arrivée au pouvoir du gouvernement Cameron), la stratégie du gouvernement basée sur l’austérité d’une part et la relance entrepreneuriale d’autre part pourrait être remise en question. C’est pourtant loin d’être le cas. Les dernières mesures annoncées par le Trésor britannique restent en effet largement axées sur le soutien de l’offre : extension du National Loan Guarantee Scheme (14 juin) qui permet aux PME de se financer à des conditions avantageuses ; annonce d’un nouveau programme de garantie (18 juillet) pour financer des investissements en infrastructures et soutenir le financement des exportations. De son côté, le programme «Funding for Lending », collaboration du Trésor et de la Banque d’Angleterre, a pour but d’inciter les banques à augmenter les crédits aux entreprises (privées non financières) et aux ménages via une baisse des taux pratiqués par ces dernières. Cela répond à la récente augmentation du coût du crédit mais pas à la faiblesse de la demande sous-jacente liée au désendettement des ménages et à l’’incertitude concernant les perspectives de demande qui limitent les investissements et de fait la demande de crédit des entreprises.
Dans son discours lors de l’ouverture de la Global Investment Conference (26 juillet), le premier ministre David Cameron a clairement indiqué que la stratégie reste inchangée soulignant que le gouvernement ferait tout ce qu’il faut pour conserver la confiance des investisseurs, ce qui passe par le contrôle des finances publiques (et par conséquent le maintien de taux d’intérêt faibles). « Nous allons poursuivre et terminer le travail » a-t-il déclaré. David Cameron a également cité les avantages concurrentiels que le gouvernement a offerts aux entreprises (fiscalité, déréglementation, soutien de la R&D et des brevets, soutien des investissements en infrastructures…) et il a réaffirmé sa volonté de soutenir les exportations et de développer les accords commerciaux afin de démultiplier le potentiel de croissance des exportations et de renforcer leur contribution à la progression de la croissance britannique… Ni la récession, ni le retard accumulé dans la résorption des déficits (public et courant) ne semblent donc pouvoir écarter le gouvernement de son programme défini il y a un peu plus de deux ans, dans un contexte pourtant bien différent.