par François Rimeu, Stratégiste Senior chez La Française AM
Quel changement en si peu de temps ! Après un mois de septembre marqué par des mouvements historiques sur les segments obligataires, les marchés ont traversé le mois d’octobre de manière beaucoup plus positive.
Les raisons de ce revirement sont multiples :
- Une saison d’annonce de résultats historiquement positive pour les marchés actions.
- La forte baisse du gaz européen en lien avec des températures très clémentes.
- La résolution de la situation politique britannique avec un nouveau gouvernement plus discipliné sur les questions budgétaires.
- Une saisonnalité mieux orientée à l’approche des élections de mi-mandat aux États-Unis.
Toutefois, si ces différents facteurs ont sans doute aidé à installer un climat plus positif, l’élément déterminant reste le changement de ton de la plupart des banques centrales et en particulier celui de la Réserve Fédérale Américaine (Fed).
Certains membres de la Fed ont en effet indiqué, autour de la mi-octobre qu’il n’était peut-être pas nécessaire d’aller plus loin que les prévisions actuelles en termes de hausse de taux. D’autres notent aussi qu’étant donné le caractère restrictif actuel de la politique monétaire, il pourrait s’avérer adéquat d’effectuer une « pause » courant 2023.
Comme certains de ces propos viennent de M.Bullard, qui est à l’origine des hausses de taux massives de la Fed en début d’année, et qu’ils ont été repris dans le Wall Street Journal par la nouvelle boussole des marchés M.Timiraos (économiste en chef au WSJ), l’impact a été immédiat et positif pour les actifs risqués : le pivot tant attendu de la Fed est enfin là ! Le message est d’autant plus convaincant qu’il a été corroboré ensuite par la décision de la banque centrale canadienne d’une moindre hausse de taux qu’anticipée et d’une communication moins offensive qu’auparavant de la part de la BCE.
Il nous paraît cependant trop tôt pour crier victoire, aussi bien du côté de la Fed que du côté de la BCE, et que signaler un réel « pivot » serait prendre un risque trop élevé pour ces institutions dont la crédibilité demeure l’actif le plus important.
L’inflation reste imprévisible et les mauvaises nouvelles s’accumulent en Chine
Côté américain, l’épargne disponible du consommateur reste encore très importante, le taux de chômage reste proche de ses plus bas historiques et l’inflation est de plus en plus diffuse. Coté européen, si les risques sur la croissance sont beaucoup plus forts, le risque inflationniste est toujours aussi présent, en témoigne les derniers chiffres sortis juste après la réunion de la BCE, qui mettent en lumière les difficultés des banques centrales à correctement anticiper l’inflation. La relance budgétaire décidée par le gouvernement japonais, d’un montant de 7% du PIB, montre de plus, que les gouvernements n’en ont pas encore terminé avec les politiques soutenant leurs économies et donc in fine avec l’inflation.
Ce changement de ton est donc à prendre selon nous avec beaucoup de précautions, d’autant plus que certains membres de la Fed ont signalé lors des derniers jours que la résilience des acteurs économiques américains pourrait amener la Fed à revoir à la hausse son taux terminal…
L’autre fait marquant du mois d’octobre est la dichotomie entre les marchés financiers chinois et leurs homologues développés. Si la corrélation est historiquement assez faible, il est tout de même frappant de voir les marchés actions chinois baisser de 15% quand les autres rebondissent de 5 à 10%. Déception quant à la levée des mesures de restriction liées au Covid ou concernant les nouvelles mesures de relance adoptées autour de la réunion du Parti Communiste Chinois, exportations en baisse ou encore croissance à Hong-Kong largement en dessous des attentes, les mauvaises nouvelles sont légion en Chine.
Dans un contexte de politiques monétaires globalement restrictives, le non-redémarrage de la croissance chinoise n’est pas une bonne nouvelle pour les prévisions de croissance mondiales.