par Hélène Baudchon, économiste au Crédit Agricole
Barack Obama a dévoilé le 8 septembre un nouveau plan pour l’emploi (bien-nommé American Jobs Act). Ce plan semble de prime abord bien conçu. Son enveloppe globale de 447 milliards de dollars est conséquente (l’équivalent de 3% du PIB). La plupart des mesures proposées consistent à prolonger un certain nombre de réductions d’impôts existantes et donc évitent un durcissement budgétaire brutal en 2012 très préjudiciable à la croissance.
Les nouvelles craintes de rechute en récession de l’économie américaine, révélatrices de la fragilité de la croissance (certes malmenée par des chocs à répétition), la faiblesse des créations nettes d’emplois, le niveau encore très élevé du taux de chômage un peu plus de deux ans après le début de la reprise (9,1% de la population active en août, soit seulement 1 point plus bas que son pic en octobre 2009), le développement d’un chômage de longue durée, le marasme du marché immobilier résidentiel, le moral extrêmement bas des Américains, sont autant de problèmes qui appellent une (énième) réponse de politique économique.
Or, la politique monétaire et la politique budgétaire ont déjà été largement sollicitées au cours des différents épisodes de la crise et des précédents accès de faiblesse de la reprise. Les marges de manœuvre restantes sont donc sérieusement limitées. Du côté de la Fed et de la politique monétaire, ce n’est pas un problème d’argent mais d’efficacité ; du côté du gouvernement et de la politique budgétaire, c’est l’inverse. La politique budgétaire (et gouvernementale au sens large, donc y compris la politique industrielle, commerciale, sociale, familiale, …) semble en effet plus à même de répondre aux difficultés actuelles rencontrées par l’économie américaine.
Sauf que le déficit budgétaire fédéral est à près de 9% du PIB (un chiffre qui, en tout état de cause, devrait diminuer et non augmenter) et qu’on ne peut actuellement compter sur le pragmatisme américain habituel compte tenu de l’extrême partisanisme qui règne à Washington (lui-même dû à l’insatisfaction face à la situation budgétaire et économique ; c’est le serpent qui se mord la queue). C’est dur de redresser la barre quand le gouvernail est coincé… Que les Américains continuent d’envisager des mesures de relance budgétaire dans ce contexte, de privilégier la croissance à la consolidation budgétaire (de refuser de sacrifier la croissance sur l’autel de la discipline budgétaire) se comprend dans la mesure où la croissance est bien le remède le moins douloureux, le plus rapide et le plus efficace pour réduire un déficit budgétaire.
C’est donc dans un contexte particulièrement difficile que Barack Obama a présenté jeudi 8 septembre son nouveau plan pour l’emploi, bien-nommé American Jobs Act. Ce plan semble de prime abord bien conçu, combinant baisses d’impôts et hausses de dépenses, toutes en faveur de l’emploi (de manière plus ou moins directe, via le pouvoir d’achat des ménages, les PME, l’immobilier, le BTP, …). Les toutes premières estimations de l’impact de ce plan (s’il était adopté dans sa globalité) parlent de 2 points de croissance en plus en 2012 et d’une baisse de 1 point du taux de chômage par rapport à un scénario économique à politique budgétaire inchangée. La Maison Blanche évoque 500 000 à 1 million emplois créés en 2012 et de 1 à 1,5 point de croissance en plus.
Son enveloppe globale de 447 milliards de dollars est conséquente (l’équivalent 3% du PIB). Son financement sera assuré par des hausses d’impôts et des baisses de dépenses ultérieures qu’Obama détaillera d’ici le 19 septembre.
La plupart des mesures proposées consistent à prolonger un certain nombre de réductions d’impôts existantes dont l’expiration était prévue fin 2011 et donc évitent un durcissement budgétaire brutal en 2012 très préjudiciable à la croissance (il ne s’agit donc pas à proprement parler d’un nouveau stimulus budgétaire, terme qu’Obama s’est d’ailleurs refusé à employer).
40% environ du total finance des hausses de dépenses mais les baisses d’impôts se taillent la part du lion avec les 60% restants. Ce faisant, B. Obama prend les républicains au mot et rend difficile un rejet, au moins de cette partie de son plan. Malgré les terrains d’entente probables, le débat promet d’être âpre et le vote incertain (malgré les injonctions répétées d’Obama à l’adopter sans tarder). Ce ne serait pas un problème si, en attendant, cela ne prenait pas la croissance en otage.