Philippe Waechter, Directeur de la Recherche Economique de Natixis Asset Management.
Il aura fallu de longs jours pour que les gouvernements européens se décident à prendre les mesures de garantie et de recapitalisation du système bancaire. Après, l'annonce anglaise de recapitalisation et de garantie d'un prêt bancaire (milieu de semaine), après la déclaration d'intentions des Etats-Unis sur la recapitalisation et la garantie des dettes bancaires, les Européens ont enfin franchi le pas. Ils recapitaliseront si nécessaire et garantiront les prêts interbancaires jusqu'à une durée de 5 ans. Cette garantie sera payante et s'appliquera jusqu'à la fin de l'année 2009.
Cela ne sera pas un fonds commun mais chacun agira en fonction des contraintes propres à son système financier. Ce qui ressort néanmoins positivement est que, contrairement au sommet du 4 octobre à l'Elysée, tous les pays de la zone Euro semblent avoir adopté des orientations cohérentes entre elles. La stratégie du coup par coup semble abandonnée. Les Norvégiens, les Australiens et les Néo-Zélandais ont adopté des mesures similaires.
Après la coordination des actions des banques centrales constatées mercredi 8 octobre, les orientations prises par les gouvernements deviennent plus cohérentes et plus en phase avec la réduction ex ante du risque. La stratégie se fait préventive et non plus curative et son champ est plus global. Les gouvernements des pays industrialisés ont désormais une réponse plus homogène. L'objectif des autorités est de réduire, dès maintenant, l'incertitude en limitant, ex ante, les risques de défaillance des banques. Si c'est le cas, cela réduira progressivement les tensions excessives constatées sur le marché interbancaire.
Un bémol
Pour l'instant, il s'agit de déclarations, les mesures effectivement prises ne seront annoncés que lundi dans l'après midi et un peu plus tard dans la semaine concernant les Etats-Unis (lundi est le Columbus Day, qui est férié)
Jusqu'à présent, la Norvège a parlé d'un apport de liquidités de 58 milliards d'euros. En Allemagne, des montants de 50 à 100 milliards d'euros sont évoqués pour recapitaliser les banques. Le plan dans son ensemble porterait sur 300 à 400 milliards. La France n'a pas annoncé de chiffres, elle le fera après le conseil des ministres exceptionnel de lundi après midi.
Les éléments disponibles pour l'instant suggèrent que désormais les gouvernements ont adopté une réponse cohérente aux difficultés constatés sur les marchés interbancaires. Ce n'était pas le cas en début de semaine dernière, notamment en Europe. Cette rupture progressive dans le comportement des gouvernements a commencé avec la garantie des dettes bancaires par l'Irlande. L'Angleterre a suivi dans la même direction (même si ses instruments de garantie sont différents), ajoutant aussi la recapitalisation des banques. Les Etats-Unis ont désormais l'intention de garantir les dettes et de recapitaliser. La zone Euro agit enfin de façon plus homogène en suivant les orientations générales initiées par l'Angleterre.
Au-delà du détail des plans que l'on ne connait pas encore, les mesures adoptées vont dans le sens d'un renforcement des fonds propres des banques (recapitalisation) et d'une réduction de l'incertitude (garantie). Elles pourraient permettre un redémarrage du marché monétaire si le détail des mesures est satisfaisant du côté des européens, si les Américains transforment leur déclaration d'intention en réalité et si les décrets du plan Paulson sur la formation du prix des actifs rachetés sont enfin publiés.
Ces mesures, une fois analysées, peuvent réduire les incertitudes et permettre un redémarrage progressif du marché monétaire. Cependant, on ne peut pas faire l'hypothèse qu'elles réduiront spontanément la volatilité excessive constatée en fin de semaine dernière sur les marchés boursiers.
Enfin, le déblocage du marché monétaire limitera, s'il a lieu, l'effet de contagion des conséquences de ce blocage sur l'économie réelle. Il n'inversera pas cependant la tendance à la récession constatée aux Etats-Unis, en Europe et au Japon.