par Christophe Morel, Chef économiste chez Groupama AM
La décision : la Fed a relevé son taux directeur, les Fed Funds, de 0.25% à 0.50%. En pratique, pour s’assurer que ce taux directeur soit bien sur sa nouvelle cible, elle a relevé à la fois son taux plafond à 0.50% (le IOER, Interest On Excess Reserve) et son taux plancher à 0.25% (le RRP, qui rémunère les liquidités qui ne sont pas éligibles à l’IOER).
Le rationnel de la décision : la Fed invoque trois arguments pour démarrer ce resserrement, à savoir i) que le marché du travail s’est « considérablement amélioré », ii) qu’elle est « raisonnablement confiante » dans le fait que l’inflation atteindra à moyen terme sa cible de 2.0%, et iii) qu’il faut démarrer maintenant pour intégrer le délai normal entre un geste monétaire et l’impact sur l’économie réelle.
La méthode : sur son premier outil de politique monétaire, les Fed Funds, le rythme de hausse sera graduel ; d’ailleurs, la Fed a légèrement abaissé sa trajectoire sur les Fed Funds d’environ 20-25 pdb (le Fed Funds moyen attendu à fin 2016 est passé de 1.50% à 1.30%, et à fin 2017, de 2.65% à 2.40%) ce qui signifie que le consensus des banquiers centraux est légèrement plus dovish qu’en septembre. Sur son second outil de politique monétaire, le bilan, la Fed précise explicitement qu’elle ne le dégonflera pas tant que la normalisation des Fed Funds n’aura pas suffisamment avancé. En nous appuyant sur les Minutes du FOMC de septembre qui faisait état d’un débat sur ce sujet, nous maintenons notre thèse que ce dégonflement du bilan ne devrait pas démarrer pas tant que les Fed Funds n’ont pas atteint 1.5%, soit avant mi-2017 selon notre scénario.
Les éléments d’attention : la Fed n’a pas modifié son diagnostic économique. En revanche, pour la première fois depuis très longtemps, elle a nuancé son analyse sur les anticipations d’inflation en reconnaissant que « certaines mesures d’anticipations de long terme avaient diminué ».
Conclusion : après l’ajustement à la hausse des anticipations de marché sur la trajectoire des Fed Funds et la légère baisse des anticipations du FOMC, l’écart a sensiblement diminué entre le marché et la Fed (cf. graphique). Cela constitue une bonne nouvelle puisque cela traduit une baisse des incertitudes, et une convergence à ce stade sur notre scénario.
Nous pensons toujours que le resserrement monétaire sera très progressif (cf. tableau avec la liste des arguments) et les récentes évolutions de marché (pétrole, dollar, marché du crédit high yield) constituent des points de vigilance sur la croissance et les anticipations d’inflation. Nous pensons toujours que la Fed ne devrait pas relever à nouveau ses Fed Funds avant juin 2016.