par Frederik Ducrozet, économiste au Crédit Agricole
Le niveau de liquidité excédentaire au dernier trimestre sera fonction de la demande adressée à l’opération de refinancement de la BCE le 30 septembre.
Des interventions de la BCE pourraient être envisagées dès le mois de décembre afin de drainer progressivement la liquidité. D’ici là, toute remontée des taux Eonia et Euribor devrait rester limitée.
L’opération de refinancement à douze mois de la BCE du 24 juin dernier, qualifiée de « grand succès » par M. Trichet, a généré un excès de liquidité massif dans le système bancaire (de l’ordre de 300 Mds € par rapport aux besoins estimés), lui-même à l’origine d’une accélération de la baisse des taux interbancaires. Mais cette opération a aussi affecté le mode de refinancement des banques.
L’évolution des encours d’opérations d’open-market (OMO) illustre la déformation des maturités des prêts contractés par les banques auprès de la BCE.
Le recours à l’allocation à douze mois s’est fait au détriment des autres OMO principales (MRO à une semaine) et de long terme (LTRO à un, trois et six mois, cf. graph. supra). La demande enregistrée aux MRO hebdomadaires a baissé de 240 Mds € en moyenne au deuxième trimestre à 80 Mds € sur le mois écoulé. La baisse est également visible sur les allocations à long terme sur les dernières semaines, ce qui a conduit à une baisse graduelle de l’excès de liquidité global autour de 130 Mds €. En conséquence, l’encours de la facilité de dépôt a même baissé sous les 100 Mds € au début de la nouvelle période de maintenance, avant d’augmenter légèrement.
Si les taux interbancaires n’ont pas réagi à la hausse, c’est que ce niveau de liquidité reste élevé dans l’absolu et que rien ne permet d’anticiper une normalisation rapide avant la fin de l’année. En effet, les données récentes suggèrent que les banques n’ont réduit leur demande aux MRO et LTRO que par anticipation de la prochaine allocation à douze mois prévue le 30 septembre. La BCE a annoncé que celle-ci serait conduite au taux refi (sans spread), et la demande adressée devrait être à nouveau importante, quoique plus faible qu’en juin. Les besoins de liquidité des banques sont désormais réduits et le potentiel de rallongement des maturités des OMO existantes paraît limité (inférieur à 100 Mds €). Ceci dit, les banques commerciales devraient profiter de cette opportunité pour consolider des positions à un an à un prix attractif, d’autant que la prochaine allocation à douze mois, le 16 décembre, pourrait bien être moins avantageuse. Une allocation totale de l’ordre de 200 Mds € n’aurait rien de surprenant. Quelle que soit l’injection nette de liquidité résultant de l’opération du 30 septembre et la réduction des encours des autres LTRO, la liquidité devrait donc rester excédentaire en zone euro jusqu’à la fin de l’année.
Des taux interbancaires bas dans tous les cas
Le taux interbancaire Eonia au jour le jour est relativement stable en zone euro depuis le début du mois de juillet, entre 0,30 et 0,40 %. Sur l’ensemble de la courbe des taux interbancaires, les taux Euribor ont également beaucoup baissé. Pour des maturités allant jusqu’à cinq mois, les taux interbancaires s’affichent désormais sous le taux directeur de la BCE (1 %). Le taux Euribor douze mois a atteint un nouveau point bas historique à 1,26 %, au même niveau que le taux Libor équivalent aux Etats-Unis. En revanche, le spread de taux OIS/BOR à trois mois s’est davantage resserré aux Etats-Unis (14 pdb, soit le même niveau que début août 2007 !) et au Royaume-Uni (25 pdb) qu’en zone euro (38 pdb) sur la période récente. Une légère remontée des taux est envisageable d’ici fin septembre, puis à nouveau en fin d’année, mais dans l’ensemble, les conditions de marché sont toujours réunies pour maintenir une pression à la baisse sur les taux interbancaires à court terme.