A partir de 2006, certains économistes jugeaient que l’économie mondiale allait vivre un découplage, avec d’un côté les pays développés c
A partir de 2006, certains économistes jugeaient que l’économie mondiale allait vivre un découplage, avec d’un côté les pays développés confrontés à une croissance molle et de l’autre des pays émergents surfant sur des taux de croissance à deux chiffres.
Le déclenchement de la crise financière, à l’automne 2008, a mis à mal cette théorie. Quelques semaines après la chute de Lehman Brothers et le collapsus des marchés financiers et bancaires, il apparaissait que les pays émergents étaient à leur tour frappés par la crise. Rien de surprenant à cela : ces économies dépendent des exportations et subissaient la baisse de la consommation dans les pays développés. En outre, ces pays ont besoin d’infrastructures et le flux de capitaux occidentaux s’est arrêté net.
Début 2009, plus grand monde ne croyait à la thèse du découplage et nous expliquions ici même que la mondialisation était entrée dans une nouvelle phase, les pays émergents devant désormais compter sur leur marché intérieur et donc stimuler la consommation pour compenser la baisse des exportations et créer ainsi un environnement leur permettant de mieux résister aux chocs externes.
Deux ans plus tard, force est de constater que le découplage est de retour. L’économie mondiale est repartie et les prévisions de croissance évoluent autour de 3% à 3,5%. Mais il existe une vraie rupture entre les pays développés, qui devraient se contenter d’un taux de 2% environ, et les pays émergents, qui affichent un rythme de 5%.
« Comme l’a dit Warren Buffet à propos des risques trop élevés pris par certains investisseurs: « C’est lorsque la mer se retire que l’on voit ceux qui se baignent nus ». Pour paraphraser ce qui est devenu un dicton, nous dirions que c’est maintenant que les effets des politiques de relance s’estompent que nous voyons l’état réel de la croissance dans les grandes économies », expliquent Yves Bonzon, directeur des investissements, et Christophe Donay, chef économiste de la banque suisse Pictet dans une récente note.
Il est clair que les pays émergents ont mieux traversé la crise. Ils disposent de situations budgétaires plus solides et ont de l’argent pour investir, notamment dans les infrastructures dont ils on besoin. Le risque le plus immédiat pour eux est l’inflation. Une menace à ne pas négliger quand on sait que les hausses des prix des produits alimentaires déclenchent souvent des émeutes et peuvent donc déstabiliser des pays dont la plupart ne sont pas des démocraties.
Ce découplage est une bonne chose pour les entreprises des pays développées qui peuvent ainsi chercher ailleurs la croissance qu’elles ne trouvent plus sur leurs marchés domestiques.
Mais le découplage peut aussi être considéré comme une nouvelle étape du basculement de la puissance économique des pays occidentaux vers les pays comme la Chine, l’Inde, le Brésil même si cela ne remettra sans doute pas en cause la suprématie des Etats-Unis.
L’Europe risque d’être la victime de ce mouvement. Pour résister les pays européens doivent s’organiser pour favoriser l’innovation et pour offrir des perspectives à leurs populations, notamment aux jeunes. Les gouvernants en ont-ils la volonté ?