par Hélène Baudchon, économiste au Crédit Agricole
- Les révisions apportées aux prévisions de croissance et d’inflation de la Fed sont marginales.
- Rien dans les Minutes ne permet de dire que le vote dissident de T. Hoening a rencontré le soutien d’autres participants.
- La stratégie de sortie est au centre des discussions. En dehors de la hausse annoncée du taux d’escompte, le calendrier reste incertain et le débat se précise sur la séquence des étapes.
La tonalité globale des Minutes du FOMC des 26-27 janvier est relativement positive. La Fed a en effet revu légèrement à la hausse ses prévisions de croissance pour 2010. Elle juge que les risques baissiers qui pèsent sur la croissance ont encore légèrement diminué. Les signes de mieux sur le front de l’emploi ne lui ont pas échappé. Et la révision également en hausse des prévisions d’inflation révèle de moindres inquiétudes quant à l’ampleur des pressions désinflationnistes.
Cependant, la Fed reconnaît que la forte croissance du quatrième trimestre 2009 est largement due à la contribution très positive des variations de stocks et que la situation sur le marché du travail reste problématique.
La Fed observe que nombre de ses contacts continuent d’afficher leur réticence à reconstituer leurs stocks, embaucher et accroître leurs capacités de production. Côté inflation, les vues restent partagées entre ceux qui pointent les risques baissiers dus à l’ampleur des ressources inemployées et ceux qui pointent les risques haussiers sur les anticipations d’inflation dus au caractère très accommodant du policy mix actuel. Ce qui compte au final, c’est que la prévision d’inflation sous-jacente reste sous la cible implicite de la Fed.
Notre propre scénario est globalement en ligne avec l’analyse de la Fed.
Stratégie de sortie : tout est dit, rien n’est dit
La hausse de 25 points de base du taux d’escompte décidée par la Fed ce jeudi 18 février n’est pas une surprise. La Fed y pensait depuis le FOMC de décembre ; Ben Bernanke y avait clairement fait allusion dans son discours de la semaine dernière sur la stratégie de sortie de la Fed ; et les Minutes du FOMC des 26-27 janvier, publiées ce mercredi, ont été plus explicites encore. De plus, avec ce geste et le retour à des prêts au jour le jour à compter du 18 mars, la Fed ne fait que ramener à la normale les conditions de fonctionnement de la fenêtre d'escompte. Avant la crise, l’écart entre le taux d’escompte et les Fed funds était de 100 pdb. Ces décisions s’inscrivent pleinement dans le processus de normalisation de la politique monétaire, au même titre que l’arrêt, au 1er février, de nombre des facilités de financement d’urgence. Ce relèvement du taux d'escompte à 0,75 % ne consiste pas en un durcissement de la politique monétaire et des conditions de financement des ménages et des entreprises. Il ne signale pas non plus un changement du scénario. La Fed continue d’anticiper que les conditions économiques justifient des Fed funds à un niveau exceptionnellement bas pour une période de temps prolongée1.
Cependant, cette décision est intervenue plus vite que ce qui était anticipé. Et cette toute première étape, concrète, de la stratégie de sortie sera suivie d’autres. Lesquelles et quand, là est la question. Les outils dont dispose la Fed sont connus : augmentation du taux de rémunération des réserves excédentaires (aujourd’hui fixé à 0,25 %), arrangements d’importantes opérations de reverse repos, mise en place de comptes à terme, vente définitive d’actifs. En revanche, il y a débat sur l’ordre dans lequel utiliser ces outils. Faut-il commencer par drainer l’excès de réserves avant de monter les taux ? Faut-il faire les deux en même temps, voire relever les taux en premier ?
La vente d’actifs doit-elle intervenir en tout dernier, une fois la reprise établie et le resserrement monétaire engagé, ou au contraire dans un avenir proche ? Plusieurs membres seraient pour ne pas tarder tandis que les autres s’inquiètent de l’impact sur les marchés et l’économie. La Fed n’a pas encore tranché. Mais le sujet est sensible à en juger la réaction des marchés. D’après nous, la séquence la plus probable est la suivante : drainage actif des réserves, ensuite hausses de taux, puis ventes d’actifs.
Dans tous les cas, un passage à l’acte n’est pas pour tout de suite.
NOTE
- A ce sujet, T. Hoenig serait en faveur d’un langage moins engageant du type « des taux bas pendant un certain temps ».