France : un peu plus de croissance, à peine moins de déséquilibres

par Héléne Baudchon, Economiste chez BNP Paribas

Les dernières enquêtes de confiance sont encourageantes et pointent vers une croissance encore élevée au premier trimestre 2017, de l’ordre de 0,4% t/t.

Le dernier bilan approfondi de la Commission européenne sur les progrès en matière de déséquilibres structurels est plus mitigé.

La compétitivité-coûts est en voie d’amélioration mais pas la compétitivité hors coûts. Le déficit budgétaire se réduit, pas le ratio de dette publique. Le taux de chômage a amorcé sa baisse mais pas le chômage de longue durée.

Sur le plan conjoncturel, la situation de l’économie française se présente mieux. Certes, l’amélioration n’est pas franche et massive et reste soumise à d’importants aléas. La croissance manque encore de dynamisme, et l’accélération attendue cette année reste modeste (1,3% d’après nos prévisions après 1,1% en 2016, en données corrigées des jours ouvrables). Mais les tous derniers indicateurs sont encourageants. L’indice composite du climat des affaires de l’INSEE s’est stabilisé à 104 en février, soit son plus haut niveau depuis 2011 et assez nettement au-dessus de la moyenne 100 de référence. Nous prévoyons un taux de croissance trimestriel de l’ordre de 0,4% au premier trimestre 2017. Mais, au regard du climat des affaires, la croissance pourrait être plus élevée et ainsi marquer une accélération par rapport au quatrième trimestre 2016. En moyenne sur janvier et février, l’indice de l’INSEE dépasse en effet d’un point son niveau moyen du quatrième trimestre. Et ce signal positif est conforté par les indices PMI de Markit (56,2 pour le composite en février, un plus haut depuis 2011 également) et par le redressement de la confiance des ménages (à son plus haut depuis 2007).

En revanche, sur le plan structurel, la situation reste détériorée d’après le dernier bilan annuel approfondi effectué par la Commission européenne. Les progrès existent, mais ils sont d’ampleur limitée au regard des déséquilibres à corriger. Ainsi, les parts de marché à l’exportation ne baissent plus depuis 2012 et la compétitivité-coûts est en voie d’amélioration, notamment grâce aux allègements de charges sur le coût du travail. Le chemin à parcourir pour regagner des parts de marché et réduire durablement le déficit commercial reste long, d’autant plus que les gains de productivité sont faibles. Les résultats en termes de niveaux d’investissements sont jugés bons mais pas les caractéristiques de ces investissements (concentrés sur un petit nombre d’entreprises dans des sous-secteurs en déclin, à faible contenu technologique). En termes d’environnement des affaires, les entreprises restent confrontées à une fiscalité élevée, à de lourdes contraintes réglementaires (malgré les tentatives d’allègement et de simplification du gouvernement actuel) et à l’instabilité de la législation. En matière de compétitivité hors coûts, l’amélioration se fait attendre.

Du côté des finances publiques, le déficit budgétaire est en passe de revenir sous le seuil des 3% cette année. Mais la Commission souligne la lenteur de l’ajustement et s’interroge sur la pérennité de la réduction du déficit. Sur la période récente, celle-ci a, en effet, été principalement due à la baisse des taux d’intérêt et aux coupes dans les investissements publics. Or, il est peu probable que les taux restent bas éternellement et il serait préjudiciable pour le potentiel économique de couper encore dans l’investissement public. Comment, dès lors, continuer à réduire le déficit comme recommandé, sachant que le poids déjà très élevé des recettes dans le PIB (53,5% en 2015) laisse peu de marge pour de nouvelles hausses d’impôts ? En réduisant le poids, lui aussi très élevé, des dépenses autres que le service de la dette et l’investissement public (51,4% du PIB en 2015, 57% toutes dépenses confondues). Pour la Commission, l’effort consenti devra être important afin d’infléchir le ratio de dette publique dont elle pointe du doigt le niveau élevé (estimé à 96,4% en 2016) et toujours en hausse.

Du côté du marché du travail enfin, le taux de chômage est en recul depuis le pic atteint en 2015. Mais cette baisse s’est enclenchée plus tardivement que dans la zone euro (où elle est amorcée depuis 2013) et plus lentement (un demi-point de moins contre un point de moins pour la zone euro sur la même période). Les deux taux de chômage se retrouvent ainsi au même niveau, légèrement sous la barre des 10% d’après la mesure Eurostat, ce qui reste élevé. De plus, le chômage de longue durée continue de progresser en France. Sur le plan des réformes, la loi Travail a abouti. Elle améliore la capacité des entreprises à s’adapter et vise ainsi à remédier à certaines rigidités du marché du travail. En revanche, la renégociation de l’assurance-chômage n’a pas avancé ni, par conséquent, le traitement de la segmentation du marché du travail que certaines modalités de cette dernière renforceraient en favorisant la succession de périodes de travail très courtes. Ce passage en revue rapide des déséquilibres macroéconomiques dont souffre la France montre l’ampleur de la tâche qui attend le prochain président de la République.

Retrouvez les études économiques de BNP Paribas