par Carla Russo, économiste à la Banca Nazionale del Lavoro (BNP Paribas)
En décembre 2008, la croissance annuelle des prêts des Institutions financières et monétaires (IFM) italiennes a atteint 4,9 % (contre 3,9 % en novembre), soutenue essentiellement par la hausse des prêts accordés aux sociétés non financières (+6,6 %) et, quoique dans une moindre mesure, par celle des prêts aux ménages (+1,4 %). Le ralentissement de la croissance des prêts aux ménages a conduit à une stabilisation du niveau d’endettement total du secteur qui, au T3 2008, en pourcentage du PIB, était équivalent à 60 %.
Au cours de 2008, les actifs financiers des ménages italiens se sont de nouveau contractés pour atteindre 3,410 milliards d’euros (-7,3% en g.a.), un niveau comparable à celui de juin 2005. En septembre 2008, les dépôts représentaient 30 % du total des actifs, un niveau inégalé depuis dix ans.
Depuis le mois de décembre, la Banque d’Italie a modifié les séries chronologiques de référence relatives au suivi des principales variables bancaires afin de les adapter aux normes de diffusion des données élaborées par le Fonds monétaire international (SDDS). En découle une modification significative des publications statistiques correspondantes et du calendrier. Ainsi, la traditionnelle mise à jour mensuelle des composantes des dépôts bancaires généralement diffusées en Italie (dépôts à vue, dépôts à terme et comptes sur livrets) ne figure plus dans les nouvelles informations.
La communication périodique des dépôts auprès des établissements bancaires et des fonds communs monétaires est, en revanche, conservée selon les définitions harmonisées du système européen des banques centrales (SEBC). Le périmètre de ce nouvel agrégat se révèle plus important, d’une part, parce que la nouvelle définition des dépôts intègre les opérations de pension livrée et, d’autre part, parce que les fonds communs monétaires sont considérés comme faisant partie des dépôts. L’évolution concerne également l’agrégat de référence relatif aux obligations : à l’avenir, seul sera mis à jour celui comprenant les prêts subordonnés.
La situation du crédit en Italie
Les encours de prêts accordés à la clientèle privée ont enregistré en décembre une hausse de 4,9 % en glissement annuel, ce qui marque une accélération par rapport au mois précédent (+3,9 % en g.a. en novembre). Le report de certaines échéances fiscales de fin novembre au 1er décembre avait, en effet, induit un moindre recours à l’endettement qui a, toutefois, engendré des besoins financiers plus importants au cours du dernier mois de l’année. L’évolution globale de l’agrégat fait apparaître, néanmoins, en décembre une orientation en ligne avec le ralentissement de la croissance des financements bancaires qui a caractérisé l’année 2008.
Les encours de prêts aux sociétés non financières ont enregistré une progression encore solide (+6,6 % en décembre, contre +6,0 % en g.a. en novembre), soutenue par une accélération de la croissance des crédits à court terme (+6,9 %, contre +3,5 % en g.a. en novembre) et par la vigueur persistante des prêts supérieurs à 12 mois (+6,4 % en décembre, contre +7,7 % en novembre). Les encours de prêts aux ménages ont, en revanche, enregistré une croissance modeste (+1,4 % en décembre, contre -0,7 % en novembre), sous l’effet de la comptabilisation des opérations de titrisation des prêts hypothécaires simultanément, il est vrai, à un ralentissement des crédits accordés au secteur. La dernière enquête sur la distribution du crédit bancaire réalisée par la Banque d’Italie fait apparaître une poursuite du repli du nombre de prêts hypothécaires ainsi qu’une stabilisation notable de la demande relative aux crédits à la consommation. Les prêts destinés aux ménages ont été affectés par les perspectives du marché immobilier, le niveau déprimé de l’indice de confiance des consommateurs, ainsi que par la faiblesse des dépenses de consommation.
La conjoncture du crédit dans la zone euro
En décembre, la progression des encours de crédits dans la zone euro s’est repliée à 5,8 % (contre 7,1 % en novembre), sous l’effet essentiellement d’un nouveau fléchissement de la croissance des prêts aux ménages (+1,8 % en décembre, contre +2,5 % en novembre). Dans tous les pays de la zone euro, tant les prêts hypothécaires que les crédits à la consommation ont subi un net ralentissement, en particulier durant le dernier trimestre de l’année, même si le phénomène est imputable en partie à l’impact des opérations de titrisation. L’analyse des données relatives aux principaux pays de la zone euro fait apparaître un net fléchissement du taux de croissance des encours de prêts aux ménages, tant en France qu’en Espagne qui représentent presque à égalité 40 % de l’agrégat.
Le rythme de croissance des encours de prêts aux ménages français a progressivement ralenti en 2008 pour s’établir à 5,5 % en décembre (contre 8,6 % en moyenne en 2008) ; le fléchissement des transactions immobilières (-44,6 % pour les logements neufs et -18 % pour les logements anciens au 3e trimestre 2008) s’est en effet répercuté sur l’évolution des prêts à l’habitat et, partant, sur celle du crédit à la consommation (selon les estimations, près d’un ménage français sur quatre ayant réalisé une acquisition immobilière contracte également un prêt destiné à financer des dépenses d’équipement du logement dans les 12 mois suivants). En Espagne, l’année dernière s’est soldée par une contraction des transactions immobilières supérieure à 25 %, tandis que la croissance des encours de prêts à l’habitat s’est repliée à 5,1 % en fin d’année (contre 8,7 % en moyenne en 2008).
Selon les dernières statistiques communiquées par la BCE, les prêts aux ménages devraient de nouveau se contracter en ligne avec la tendance de long terme, conséquemment à la baisse des prix des logements et à la détérioration de la confiance des ménages.
Dans l’ensemble de la zone euro, le ralentissement des crédits aux ménages s’est traduit par une stabilisation de leur niveau d’endettement en pourcentage du PIB. Suite à l’augmentation massive observée entre 2002 et 2006, ce ratio s’est inscrit, au troisième trimestre 2008, aux alentours de 60 % et révèle de fortes disparités d’un pays à l’autre. Fin 2008, le niveau d’endettement des ménages vis-à-vis des seuls établissements de crédit variait, selon les estimations, de 80 % en Espagne, Irlande et Portugal, à 30 % en Italie et 21 % en Slovénie.
S’agissant du passif des ménages, ce qui importe c’est le niveau de l’endettement ou sa distribution. Les conséquences récentes sur l’économie des problèmes auxquels sont confrontés les ménages américains très endettés, ainsi que les profonds déséquilibres dans la concentration des richesses, mettent en évidence l’importance des comportements d’individus appartenant à des catégories de revenu différentes.
L’aggravation des difficultés liées à la situation conjoncturelle actuelle a rendu les autorités monétaires beaucoup plus attentives à la situation des ménages, y compris en Europe. Estimant que les données disponibles à l’échelle de la zone euro ne sont plus suffisantes pour apprécier le risque du secteur, la BCE a élaboré un projet (HFCN Household Finance and Consumption Network) visant à réaliser au cours des deux prochaines années, dans chacun des pays de la zone euro, une enquête auprès des ménages dans le but de recueillir des informations sur les variables suivantes : démographie, activités réelles et financières, passif, habitudes de consommation et d’épargne, revenus et emploi, plans de prévoyance, transferts intergénérationnels et propension au risque.
Collecte bancaire en Italie et actifs financiers des ménages
Le rythme de croissance de la collecte bancaire a enregistré en décembre un léger fléchissement, à 11,7 % en rythme annuel (+14,5 % en novembre). Le règlement des échéances fiscales en décembre a eu, en effet, des répercussions sur le taux de croissance des dépôts qui s’est réduit à 6,1 %, contre 9,8 % en novembre. L’engouement en faveur des obligations s’est confirmé avec une croissance de 21,2 % (contre 22,1 % en novembre).
Les dernières données disponibles au niveau sectoriel (novembre) font état d’une augmentation sensible des dépôts des ménages à 7,3 % (+6,6 % en octobre), avec des taux de croissance plus élevés dans le nord du pays (+9 %) par rapport aux régions méridionales (+5 %).
Les effets de la crise actuelle sont également perceptibles au niveau de la composition des actifs financiers des ménages. La dernière enquête (septembre 2008) indique, pour le troisième trimestre consécutif, une diminution des actifs financiers des ménages (-7,3 % en g.a.), sous l’effet, essentiellement, de la sévère correction subie par les marchés d’actions. Ainsi, la valeur des actifs logés dans les fonds d’investissement et celle des actions ont diminué en rythme annuel de 30 % environ pour ces deux catégories. Le volume des actifs financiers s’est réduit en septembre à 3,410 milliards d’euros, un niveau équivalant à celui de juin 2005.
La recherche par les ménages d’investissements peu risqués a eu un impact positif sur les dépôts et les titres de dette (obligations bancaires, valeurs du Trésor), qui ont enregistré une augmentation de 7,4 % et 8,9 % respectivement. La composition du portefeuille des ménages en a été modifiée. Ainsi, en septembre 2008, les dépôts constituaient 30 % des avoirs, soit 4 points de pourcentage au-dessus du niveau enregistré un plus tôt et la valeur la plus élevée depuis dix ans.