Nouveau Plan de Stabilité Financière : TARP repetita ?

par Hélène Baudchon et Estelle Honthaas, économistes au Crédit Agricole

• Le nouveau plan de soutien au système financier s’inscrit dans la continuité du TARP tout en lui ajoutant deux éléments novateurs : la conditionnalité des injections de capital à la réalisation de stress tests et la création d’un partenariat public-privé pour le rachat des actifs toxiques.
• Le plan se veut une réponse complète à la crise, à la mesure de l’ampleur des problèmes.
• Cependant, l’absence de détails rend difficile l’évaluation de son potentiel de réussite.

Malgré les aides de l’Etat accordées dans le cadre de l’EESA (Emergency Economic Stabilization Ac), l’activité de prêt est toujours insuffisante par rapport aux besoins de l’économie américaine, et le marché immobilier continue sa chute, aggravant les problèmes de solvabilité des banques et pesant sur l’offre de crédit. Or, pour que le stimulus budgétaire en passe d’être ratifié produise tous les effets escomptés, il est indispensable que le système financier fonctionne le plus normalement possible.

Injections de capital et fond de rachat d’actifs toxiques

La faible solvabilité du secteur bancaire et son impact sur l’offre de crédit sont désormais bien identifiés. C’est pourquoi le FSP projette d’encourager les recapitalisations par appel au marché, mais également de poursuivre la recapitalisation des établissements telle qu’instaurée par le TARP. L’accès à ce dispositif est désormais conditionné, pour les principales banques, à la mise en place de stress tests destinés à mesurer les besoins réels de ces établissements pour assumer leur mission de prêteurs.

Au-delà des recapitalisations, le deuxième volet du plan Geithner pour améliorer la solvabilité des banques prévoit d’extraire des bilans bancaires les actifs toxiques. Le secteur privé serait associé à ce programme, avec l’objectif, d’une part, de limiter l’implication financière et l’exposition du Trésor, et, d’autre part, de contribuer au travail de valorisation de ces actifs. Ce programme serait doté de 500 à 1 000 milliards de dollars.

Ces deux mesures sont de nature à peser positivement sur l’offre de crédit. L’association d’investisseurs privés à ce dernier programme est une idée nouvelle et intéressante. Si elle parvient à inciter des investisseurs à acheter ces actifs, elle pourrait en effet rendre sa liquidité au marché plus rapidement que ne le ferait une bad bank publique, moins contrainte par le temps. Or, les investisseurs privés n’accepteront de racheter ces actifs qu’avec de fortes décotes. Ce qui rendra l’opération coûteuse en capital pour les banques, et pourrait les conduire à renoncer à ce type de transaction. Inversement, une valorisation « excessive » de ces actifs ferait fuir les investisseurs privés, et serait coûteuse pour le contribuable américain si le Trésor procédait lui-même au rachat de ces actifs. Cette solution risque donc de buter, comme ce fut le cas lors de la version initiale du TARP, sur l’épineux problème de la valorisation des actifs toxiques.

Relance du marché de la titrisation

L’amélioration de la solvabilité des banques revient à soutenir le marché primaire du crédit. Toujours dans l’objectif de faciliter le financement de l’économie, le Plan de Stabilité Financière vise à soutenir également l’important marché secondaire du crédit, quasiment gelé depuis le début de la crise. Pour cela, T. Geithner propose d’utiliser la TALF (Term Asset-Backed Securities Loan Facility), annoncée par la FED en novembre 2008, et destinée à l’époque à soutenir la titrisation des crédits à la consommation et aux PME. La facilité était initialement dotée de 200 milliards de dollars. Désormais, la TALF (renommée dans le plan Consumer and Business Lending Initiative) sera dotée de 1 000 milliards de dollars, et cible en plus les titres adossés à l’immobilier commercial.

Soutien au marché immobilier

Si le plan Geithner promet de nouvelles mesures d’aide au marché immobilier, c’est parce que toutes celles qui ont déjà été prises n’ont pas fait la preuve de leur efficacité. Or, il faut impérativement mettre un terme à la spirale baissière dans laquelle le marché immobilier est enferré, qui conduit les banques à déprécier leurs actifs, accroît leurs pertes, entame leur solvabilité, et restreint leur offre de crédit. Le plan Geithner propose donc notamment d’allouer 50 milliards de dollars pour prévenir les saisies qui peuvent l’être. Là encore, des précisions devraient suivre d’ici peu.

Quels résultats attendre de ce plan ?

Malgré la volonté affichée de s’inscrire en rupture par rapport à ce qui a déjà été fait par l’administration précédente, l’action proposée s’inscrit largement dans la continuité. Néanmoins, de par son nom, les efforts de transparence promis, les montants en jeu et le périmètre qui lui est accordé, le FSP est d’ores et déjà plus ambitieux que le TARP. Il confirme que cette administration a pris la mesure des immenses besoins du secteur financier.

Pour le reste, ce plan contribuera probablement à ramener la stabilité sur les marchés financiers et à relancer le crédit, élément vital pour l’économie américaine. Mais le flou entourant les modalités précises de l’application de ce plan rend difficile l’estimation de son potentiel de réussite. Par ailleurs toutes ces mesures, si tant est qu’elles soient suffisamment bien calibrées pour être efficaces, mettront de toute manière beaucoup de temps à produire leurs effets.