UEM : légère accélération de la croissance au premier trimestre 2010 (+0,2% t/t)

par Olivier Bizimana, Bénédicte Kukla et Axelle Lacan, économistes au Crédit Agricole

  • La croissance en zone euro a légèrement accéléré au premier trimestre 2010. En première estimation, le PIB de l’ensemble de la zone euro est ressorti à +0,2 % t/t au T1 2010, après une stagnation au T4 2009.
  • En France, la progression du PIB reste modérée au premier trimestre, à +0,1 % t/t, en deçà de la performance du quatrième trimestre 2009 (+0,5 % t/t, révisée à la baisse de 0,1 point).

 

Zone euro : la croissance a légèrement accéléré au premier trimestre 2010

L‘activité en zone euro a légèrement progressé au premier trimestre 2010. En première estimation, le PIB de l’ensemble de la zone euro est ressorti à +0,2 % t/t au T1 2010, après +0,1 % au T4 2009. Ce résultat est légèrement supérieur aux attentes (consensus Bloomberg : +0,1 % t/t). Parmi les grands pays de la zone euro, seule la France a enregistré un ralentissement de la croissance en début d’année 2010 (+0,1 % t/t, après +0,6 % t/t au T4 2009). Le PIB allemand a progressé de 0,2 % t/t au T1. De plus, le résultat du quatrième trimestre a été revu à la hausse (+0,2 % t/t, contre 0 % auparavant). Dans les pays du sud de la zone euro, les premiers résultats d’activité pour 2010 ont également été plutôt encourageants. En particulier, le PIB italien a bondi plus que prévu au premier trimestre (+0,5 % t/t). De plus, les résultats de PIB depuis le deuxième trimestre 2008 ont été révisés à la hausse : le recul de l’activité au T4 2009 a notamment été moins marqué qu’initialement annoncé (-0,1 % t/t, contre -0,3 % t/t). Par ailleurs, après sept trimestres consécutifs de croissance négative, l’économie espagnole est enfin sortie de récession au premier trimestre 2010 (+0,1 % t/t, après -0,1 % t/t au T4 2009). L’activité au Portugal a également surpris à la hausse au premier trimestre (+1,0 % t/t, après -0,3 % t/t). En revanche, l’activité en Grèce a continué à se contracter en début d’année (-0,8 % t/t, après -0,8 % t/t).

Le détail des comptes nationaux pour l’ensemble de la zone euro sera publié début juin. Néanmoins, les données conjoncturelles mensuelles permettent de se faire une idée sur les moteurs de la croissance en zone euro en début d’année 2010.

Les enquêtes de confiance ont progressé dans pratiquement tous les secteurs, en particulier dans l’industrie. Les taux d’utilisation des capacités de production dans ce secteur restent certes à un bas niveau, mais ils se sont quelque peu redressés au premier trimestre 2010. Ceci nous laisse penser que la chute de l’investissement productif a continué à se modérer. De plus, la confiance dans la construction s’est légèrement améliorée, ce qui suggère que la baisse de l’investissement dans ce secteur en début d’année, en lien avec les températures plus faibles qu’à l’accoutumée, a sans doute été moins forte qu’anticipé. Par ailleurs, la poursuite de la hausse des commandes adressées à l’industrie depuis le début de l’année suggère que les exportations ont progressé.

En revanche, la consommation est probablement restée faible, en raison de l’arrêt et/ou de la réduction des mesures de soutien (primes à la casse notamment) et de la poursuite de la dégradation du marché du travail. L’incertitude porte sur les ajustements des stocks.

 France : la croissance freine au premier trimestre…mais ne cale pas (+0,1 % t/t)

– Une croissance modeste au premier trimestre

Le taux de croissance du PIB affiché par la France en ce début d’année est modeste, mais pas totalement décourageant. La première estimation du PIB est ressortie à +0,1 % t/t au premier trimestre, après +0,5 % t/t au quatrième trimestre (chiffre révisé à la baisse de 0,1 point).

Une fois n’est pas coutume, la consommation des ménages stagne au premier trimestre. Ce mouvement était prévisible, la réduction de la prime à la casse au 1er janvier ayant soutenu les achats d’automobiles en fin d’année dernière. Malgré ce freinage sec de la consommation des ménages, l’investissement, même s’il pèse toujours sur la croissance, poursuit son redressement (-0,8 % t/t, après -1,1 % t/t). Côté entreprises, il se contracte à un rythme moindre qu’au quatrième trimestre 2009 (-0,9 % t/t, après -1,3 % t/t). La dynamique est encourageante, la dernière enquête Insee sur les investissements dans l’industrie également : les entrepreneurs de l’industrie manufacturière anticipent une hausse de 6 % de leurs investissements au second semestre par rapport au premier semestre. En parallèle, le taux d’utilisation des capacités de production se redresse progressivement. Côté ménages, l’investissement suit la même trajectoire (-0,7 % t/t, après -1,5 % t/t au quatrième trimestre), notamment grâce à des conditions de financement favorables. Au total, la demande domestique (hors stocks) contribue négativement à la croissance du PIB au premier trimestre (-0,1 point).

La contribution du commerce extérieur est positive (+0,4 point), portée par le rebond des exportations (+3,9 % t/t). Les exportations de biens manufacturés ont été particulièrement dynamiques en ce début d’année, alors que les importations de ces mêmes biens, plombées par le freinage des achats d’automobiles, ont décéléré.

La dynamique des ajustements de stocks reste atypique en cette phase de reprise. Le moindre déstockage avait apporté une contribution positive à la croissance au quatrième trimestre 2009 (+0,6 point). De même, un début de restockage semblait prévisible en ce début d’année, les enquêtes faisant état de stocks jugés trop faibles. Ce n’est pas le cas. Les stocks continuent à s’alléger, contribuant négativement à la croissance au premier trimestre (-0,1 point).

– Après la convalescence, le rétablissement ?

Les enquêtes de confiance publiées en avril font état d’un redressement de la croissance au deuxième trimestre. L’amélioration de la confiance dans l’industrie se confirme. Le secteur des services semble enfin tirer son épingle du jeu, l’indicateur synthétique du climat des affaires progressant de 6 points, à 98 en avril. La reprise serait-elle moins molle qu’attendu ? Cela reste à prouver. Le moral des ménages se détériore à nouveau. L’augmentation du chômage et un environnement plus incertain, en lien avec les problèmes de finances publiques, ne favorisent pas l’entrain général. Dans ce contexte, la demande domestique devrait soutenir la croissance au deuxième trimestre, mais modestement. Le commerce extérieur devrait peu ou prou bénéficier de la reprise mondiale, même si l’insuffisante compétitivité des produits français devrait conduire à une hausse des exportations somme toute limitée. Le cycle des stocks pourrait apporter un soutien opportun à la croissance au deuxième trimestre.

Au total, nous prévoyons une hausse du PIB de l’ordre de 0,3-0,4 % t/t au deuxième trimestre 2010.

Quelles sont les perspectives à court terme pour l’ensemble de la zone euro ?

Le regain des tensions financières ces dernières semaines, en lien avec les problèmes des finances publiques en zone euro, fait peser un risque baissier sur notre scénario central. Nous pensons, toutefois, que le plan de soutien financier européen a considérablement limité la transmission du choc sur l’activité1. Néanmoins, le choc de confiance devrait persister au moins jusqu’à la fin de l’année.

La croissance attendue au deuxième trimestre devrait être peu affectée par ces évolutions. Nous anticipons une accélération de la croissance dans l’ensemble de la zone euro (+0,5 % t/t). Le climat des affaires a, en effet, nettement accéléré en avril. La bonne performance des données d’activité en mars (production industrielle notamment), suggère également un acquis très favorable pour le deuxième trimestre. Au-delà, la croissance devrait restée très modérée jusqu’à la fin de l’année (de l’ordre de 0,2 % en moyenne pour le second semestre 2010).

Au plan géographique, nous prévoyons une poursuite des divergences entre les pays du centre (notamment l’Allemagne, les Pays-Bas et dans une moindre mesure la France), et ceux du sud de la zone euro (Espagne, Grèce et Portugal). La croissance dans les pays du sud devrait continuer à être bridée par le processus de consolidation budgétaire à l’œuvre.

NOTES

1 – Pour plus de détails sur le plan de soutien financier européen voir Eco News N°145 du 10 mai 2010.

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