par Ariel Bezalel, Gérant du fonds Jupiter Dynamic Bond chez Jupiter AM
Une sortie du Royaume-Uni de l’Union Européenne aurait très certainement des répercussions négatives sur le rayonnement international du pays mais pourrait aussi remettre en question le projet Européen. Le résultat pourrait être un choc global produisant une volatilité importante à travers tous les actifs risqués.
Depuis le début de l’année, le spectre du départ du Royaume-Uni de l’Union Européenne lors du référendum qui se tiendra le 23 juin prochain préoccupe de plus en plus les investisseurs. Selon nous, les conséquences immédiates d’un vote en faveur du départ du Royaume-Uni seraient une baisse de la livre sterling et une baisse des actifs britanniques, les marchés ayant horreur de l’incertitude. Cependant, nous ne sommes pas convaincus qu’à long terme l’impact économique soit particulièrement négatif. En fait, une monnaie plus faible aurait au moins l’avantage de stimuler les exportations britanniques. Par ailleurs, nous ne pensons pas que beaucoup de pays en Europe stopperaient purement et simplement tout commerce avec le Royaume-Uni si le pays quittait l’UE.
En réalité, c’est la potentielle scène politique qui nous préoccupe, scène politique dans laquelle la position de l’Europe serait grandement diminuée sans le Royaume Uni et la place du Royaume-Uni serait également très diminuée au niveau mondial. De plus, le Brexit devrait créer une incertitude politique dans le pays étant donné qu’il est hautement probable que le premier ministre David Cameron démissionne. Nous pensons également que le départ du Royaume-Uni pourrait remettre en cause l’existence même du projet européen. Dans des pays comme la France, la Pologne ou l’Espagne, des partis extrémistes autrefois en marge gagnent du terrain sur la scène politique européenne. Une sortie du Royaume-Uni aurait selon toute vraisemblance comme conséquence une hausse de la popularité des mouvements contestataires européens. C’est cela, qui selon nous, devrait créer de la volatilité sur toutes les classes d’actifs, et c’est ce qui explique que les ministres des Finances réunis lors du G20 aient alerté sur le fait qu’un Brexit pourrait se traduire par un choc d’ampleur internationale. Nous avons donc rééquilibré notre portefeuille pour tenter de contenir ce risque.
Durant quasiment tous le mois de février, les actifs britanniques ont été sous la pression d’investisseurs de plus en plus inquiets face à la possibilité du Brexit. Depuis, ces derniers ont réalisé que les entreprises britanniques étaient plutôt en bonne santé, ce sentiment a reculé et le risque avec lui : nous avons donc assisté à un semblant de rallye sur les valeurs britanniques. Il faut bien se rappeler qu’un contexte de taux bas combiné à une relative bonne santé économique devrait permettre à de nombreuses entreprises que nous avons en portefeuille de rembourser leurs dettes plus rapidement.
Notre position
Le Royaume-Uni reste une allocation importante de notre portefeuille international. Le pays représente environ 28% de l’allocation du fonds, environ la moitié étant consacrée à des banquesi. Il y a plusieurs raisons pour lesquelles nous sommes positifs sur ce pays. Tout d’abord, nous pensons que la politique monétaire va rester accommodante encore un certain temps. En réalité, les taux ne devraient pas remonter en Grande-Bretagne avant la fin de l’année prochaine. Deuxièmement, l’économie britannique est relativement en bonne santé et a surperformé ses comparses. Enfin, nous avons préféré les banques anglaises à celles de la zone euro car elles nous semblent être, d’une manière générale, les plus en forme d’Europe. C’est un élément crucial étant donné que l’époque où les détenteurs d’obligations pouvaient s’attendre à être renfloués en cas de faillite bancaire est révolue. Les contribuables ne sont, selon nous, plus du tout enclins à apporter leur soutien aux investisseurs obligataires. Nous nous attendons d’ailleurs à assister à de plus en plus de bail-ins d’ici un à deux ans, par conséquent il est capital d’éviter les banques qui ne nous paraissent pas en bonne santé. Dans notre portefeuille, on trouve notamment Lloyds, RBS, Nationwide, Coventry et Barclays.
L’appel de la dette souveraine
Aujourd’hui, presqu’un tiers du portefeuille est constitué de dettes souveraines de bonne qualité comme de la dette américaine ou australienne, qui tendent à bien performer lorsque les actifs risqués sont bas et cela a participé à la performance du fonds en janvier et février. Par ailleurs, environ 2% du fonds est investi dans des obligations convertibles émises par des minières aurifères qui ont bien performé dernièrement étant donné que l’or est maintenant perçu comme une valeur refuge.
Le monde se débat avec de nombreux problèmes. En novembre se tiendra une élection présidentielle américaine dont l’issue est loin d’être certaine. Peu importe qui l’emporte, il devrait y avoir de grands changements dans la politique américaine. Par ailleurs, l’économie chinoise continue de s’affaiblir. En tant qu’importateur majeur de nombreux pays pour tout ce qui est biens et services, le ralentissement chinois a des répercussions mondiales. Pour toutes ces raisons, le moment est venu de faire attention où on met les pieds.