Actions/obligations/devises et matières premières : corrélation ou découplage ?

par Patrick de Fraguier, Stratégiste chez Amundi AM

Des raisons objectives d’être plus prudent

Après les points de passages obligés de la période estivale tels que :

  • les stress tests bancaires européens
  • la publication des résultats trimestriels et leur ratio de surprises
  • les reports de régulation du secteur assurance
  • la nouvelle étape de politique non conventionnelle de la Fed

par Patrick de Fraguier, Stratégiste chez Amundi AM

Des raisons objectives d’être plus prudent

Après les points de passages obligés de la période estivale tels que :

  • les stress tests bancaires européens
  • la publication des résultats trimestriels et leur ratio de surprises
  • les reports de régulation du secteur assurance
  • la nouvelle étape de politique non conventionnelle de la Fed
  • la remontée localisée du risque souverain en zone euro et potentiellement porteurs de variation de tendance et de volatilité des marchés, on peut naturellement se poser la question suivante : que nous disent implicitement les marchés dans leur ensemble et plus particulièrement le comportement relatif des classes d’actifs en termes d’allocation ? Les réponses peuvent se développer sur 3 axes principaux qui devraient faire l’objet d’une analyse par les investisseurs longs terme : le niveau d’équilibre des taux long terme et la hiérarchie des primes de risque, l’articulation entre volatilité macro et marchés et la corrélation actions/obligations.

 

Taux longs au plus bas : les leçons de l’histoire

Cet été, les taux longs des emprunts d’Etat allemands et américains ont plongé de 40 pb pour atteindre leurs plus bas depuis de nombreuses années, respectivement 2,20% sur le Bund et 2,45% sur les Treasuries, résultant du double impact de la poursuite du « quantitative easing » et de la fuite vers la qualité. Durant le fameux « conundrum des taux » entre 2004 et 2006, alors que la banque centrale américaine augmentait ses taux directeurs lors de ses meetings, les taux longs sont restés étonnamment stables au point d’être qualifiés d’« énigme » par A. Greenspan. Le niveau des taux longs par rapport à leur niveau théorique, déterminé grâce à un modèle fondamental, montre que l’anomalie a été d’environ 50 pb. Deux types d’explications ont été invoqués : le changement d’attitude des investisseurs vis-à-vis du risque et l’intensification des flux d’achat de Bons du Trésor. Ces variables peuvent en théorie être responsables du déclin de la prime de risque obligataire mais elles expliquent en pratique moins de la moitié de l’anomalie (*).

Les investisseurs long terme pris entre volatilité macro et marchés

Pour déterminer une allocation d'actifs à long terme, quelques questions viennent naturellement à l’esprit :

  • qu’en est-il du risque de retour de l’inflation ? dont les causes et conséquences sont liées à l’évolution de la liquidité, des taux et des pays émergents (Chine essentiellement) ?
  • comment les prix des actifs vont-ils réagir à l’écart entre les taux d’intérêt et de croissance ?
  • quel sera l’impact de la surliquidité mondiale sur les parités de change (y compris les devises « pegged ») et la volatilité des devises ?
  • quels sont, en phase de deleveraging, les nouveaux besoins de financement des agents pour déterminer les spreads de crédit ?
  • comment les écarts de taux entre pays vont-ils évoluer selon les des différentiels de croissance potentielle et de compétitivité ?

Corrélation actions/taux : le nouveau paradoxe

Au cours de la dernière décennie, les marchés obligataires et d’actions ont très souvent évolué en parallèle. Toutefois depuis un an on assiste, indépendamment des anticipations sur le couple croissance/inflation et de l’évolution des déficits publics, à une divergence de trajectoire. Un découplage étonnant qui incite à revisiter les facteurs traditionnels déterminant la corrélation – positive ou négative – entre actions/obligations, à savoir le cycle conjoncturel, l’aversion au risque, l’évolution exogène/autonome du prix des matières premières et enfin le caractère plus ou moins expansionniste de la politique monétaire.

Dans le contexte actuel, combiner des actifs faiblement corrélés permet de diversifier le risque d’un portefeuille, à défaut d’en augmenter significativement le rendement. Au-delà des relations théoriques actions/taux, la situation de déflation générée par l’excès de dette doit tenir compte non seulement du niveau de taux d’intérêt réels mais aussi du nouveau rôle des banques centrales comme acteur en dernier ressort.

Pour rester investi sur les actifs risqués, le scénario central demeure celui :

  • de la crédibilité des banquiers centraux dans la prise en compte de la fragilité de la reprise et – d’une perspective de réduction des taux d’intérêt réels qui, quand ils sont trop élevés, sont généralement défavorables à terme notamment aux actions.

Le pire, de manière asymétrique, serait une remontée des taux d’intérêt long terme déconnectée des perspectives de croissance mais liée à un problème de risque (rating essentiellement) sur les émetteurs souverains les mieux notés et qui de surcroît sont les plus gros emprunteurs/débiteurs.

NOTES

(* ) M. Brière., O. Signori and K. Topeglo, “Bond Market Conundrum: New Factors to Explain Long-Term Interest Rates“, Banque et Marchés, 92, janvier-fevrier 2008.