Opportunités

La crise économique qui frappe la planète depuis l’automne suscite une inquiétude croissante parmi les citoyens.

La crise économique qui frappe la planète depuis l’automne suscite une inquiétude croissante parmi les citoyens. Ils ont vu le système financier s’effondrer après plusieurs années de croissance alimentée par la sophistication grandissante des produits financiers et l’utilisation massive des effets de levier, c’est-à-dire de l’endettement. L’ajustement a commencé et personne ne sait combien de temps il prendra. Il est certain que l’année 2009 verra une récession mondiale, avec une forte contraction du Produit intérieur brut (PIB) dans les pays riches et un ralentissement dans les pays émergents. Il est certain aussi que le taux de chômage va augmenter, diverses estimations faisant état de 20 millions de chômeurs de plus dans le monde cette année.

Les raisons d’être inquiet sont donc nombreuses. Mais on peut aussi se dire que la crise offre des opportunités. De innovations vont apparaître, de nouveaux comportements vont s’imposer, de nouvelles activités vont permettre de créer des richesses et donc des emplois. Mais cela nécessite une implication forte de la part des pouvoirs publics car ils sont les seuls aujourd’hui à pouvoir définir une politique d’investissement.

Le président américain élu Barack Obama, qui prendra ses fonctions le 20 janvier, l’a compris avant les autres dirigeants occidentaux en promettant un plan massif d’investissement pour l’Internet à haut débit, pour l’efficacité énergétique des bâtiments publics et pour le développement des énergies renouvelables.

Avec la crise économique actuelle, nous changeons d’environnement. Le système bancaire est contraint de réduire son effet de levier. Celui-ci avait atteint 1 à 30 voire 1 à 40 ces dernières années, c’est-à-dire qu’une banque pouvait engager jusqu’à 40 dollars pour chaque dollar de fonds propres qu’elle avait. Il était évident qu’un dégonflement de la valeur des actifs provoquerait une crise mais personne ou presque n’a voulu le voir. Le “deleveraging” en cours va se traduire forcément par une moindre rentabilité. Les valorisations des banques ont déjà été fortement réduites et le mouvement devrait continuer tant que les investisseurs auront l’impression que les bilans n’ont pas été totalement nettoyés des produits financiers toxiques.

Plus largement, ce sont les secteurs industriels qui ont soutenu la croissance au cours du XXe siècle qui sont aujourd’hui menacés. L’automobile, formidable outil de liberté pendant des décennies, est considérée aujourd’hui comme une menace pour l’environnement. Les constructeurs doivent réinventer leur industrie. Ils doivent mettre l’accent sur les véhicules propres pouvant se passer des énergies fossiles. Les pouvoirs publics ont là un rôle crucial à jouer en fixant des normes et en distribuant des aides financières ciblées.

Il est clair que les questions environnementales obligent à repenser l’urbanisation et par conséquent les transports. Nous allons vers des villes de en plus en plus denses mais nous allons aussi vers davantage de travail à distance. Cette évolution est favorisée par les nouvelles technologies de l’information et de la communication (TIC). L’heure est venue de revoir non seulement l’organisation des villes mais aussi l’organisation du travail dans les entreprises. S’il est évident que l’on ne remettra pas en cause le modèle des entreprises industrielles, qui repose sur des usines intégrées, il en va tout à fait autrement pour le secteur tertiaire. Nombre d’emplois peuvent être “virtualisés” grâce au télétravail. Ce mouvement est déjà à l’oeuvre et doit être encouragé car il peut offrir des opportunités à ceux qui sont sans emploi aujourd’hui et qui peuvent créer une activité depuis leur domicile. Par exemple, une personne peut réaliser un travail de secrétariat pour plusieurs entreprises. Le télétravail a pour inconvénient de couper le travailleur d’un univers professionnel. Pour y échapper, on peut créer des centres où plusieurs dizaines de travailleurs exerçant pour plusieurs entreprises peuvent se retrouver chaque jour. Les investissements nécessaires ne sont pas excessifs et peuvent être efficaces.

Le secteur énergétique doit aussi revoir son modèle. La France, qui a fait le choix du nucléaire avec EDF, est moins sous la contrainte que les autres pays européens. Mais cela ne doit pas l’empêcher de participer à un plan global en faveur des économies d’énergies et en faveur des énergies renouvelables. Car, ne nous y trompons pas, le pétrole ne restera pas aux bas niveaux actuels très longtemps. Même si les compagnies pétrolières découvrent chaque année de nouveaux gisements, c’est une ressource qui disparaîtra un jour. Pour le moment, les estimations font état de 40 années de réserves prouvées à consommation constante. Peut-être pourra-t-on gagner encore dix ou vingt ans mais on doit bien admettre que c’est relativement court à l’échelle de la planète.

D’une manière générale, les pouvoirs publics doivent mettre l’accent sur l’innovation. Bien sûr, des mesures de court terme comme la relance budgétaire sont nécessaires pour limiter l’impact de la crise. Mais le vrai sujet, qui conditionne la compétitivité des pays pour les dizaines de prochaines années, porte sur l’innovation. La crise doit permettre de sortir des schémas de réflexion habituels.