Pétrole : en attendant le rebond

C’est un mouvement rarement observé : les cours du pétrole ont accusé en octobre leur baisse mensuelle la plus importante depuis février 1986 (36% contre 30%).

C’est un mouvement rarement observé : les cours du pétrole ont accusé en octobre leur baisse mensuelle la plus importante depuis février 1986 (36% contre 30%).

Entre fin septembre et fin octobre, le prix du baril est passé de 100 dollars à 64 dollars. La chute est de 56% par rapport au record de 147,27 dollars atteint le 11 juillet. A l’époque, certains économistes pariaient sur un baril à 200 dollars fin 2008. Que s’est-il donc passé pour que l’or noir perde ainsi de son attrait ? C’est une conséquence de la crise économique, bien entendu. Le ralentissement a déjà des effets inquiétants : selon le directeur général de BP, Tony Hayward, la demande américaine de pétrole a reculé au rythme de deux millions de barils par jour sur les quatre dernières semaines. Un chiffre énorme quand on sait que la consommation de pétrole a augmenté de deux millions de barils par jour ces dernières années en raison du fort développement des pays émergents. 

Cette baisse de la demande, qui montre l’ampleur de la crise économique que traversent les pays occidentaux, va-t-elle continuer ? La plupart des économistes le pensent. Goldman Sachs a ainsi revu en baisse de 110 à 70 dollars sa prévision du cours du baril pour 2009. Société Générale a abaissé la sienne de 36% à 72,50 dollars.

Mais cette baisse est-elle durable ?

Le repli du pétrole peut permettre une reprise plus rapide de l’économie après la période de récession qui vient de commencer. Selon une étude de Deutsche Bank, chaque dollar en moins sur le prix de l’essence aux Etats-Unis représente 100 milliards de dollars pour les foyers américains. Cette somme pourrait générer trois millions d’emplois. Il faut noter que le gallon – qui est l’unité de mesure à la pompe dans ce pays – coûtait 4,114 dollars mi-juillet et qu’il est tombé ces derniers jours autour de 2,5 dollars. De quoi doper l’activité. Une nette reprise de l’activité – qui n’est toutefois pas anticipée avant 2010 voire 2011 – aurait pour effet de faire progresser la demande pour le pétrole et donc le prix du baril. Mais, même sans cet aspect, de nombreux experts doutent que le pétrole reste au niveau actuel. Pour plusieurs économistes, le cours d’équilibre du pétrole est aujourd’hui de 80 dollars.

C’est le prix que vise par exemple l’Arabie saoudite, premier producteur mondial tandis que le Venezuela et l’Iran veulent plutôt un baril à 100 dollars. Il faut dire que si l’envolée du pétrole a rempli les coffres des pays producteurs ces dernières années, la chute actuelle suscite des inquiétudes sur leur capacité à tenir leurs finances publiques et à financer des programmes de développement. C’est la raison pour laquelle l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), qui représente environ 40% de la production mondiale, a agi promptement en décidant d’une baisse de 1,5 million de barils par jour. Le Venezuela réclame même une réduction supplémentaire d’un million de barils. Il est à noter que les membres de l’OPEP ont refusé majoritairement ces derniers mois d’augmenter la production. Pas seulement parce qu’ils voulaient maintenir les prix à un niveau élevé. C’est parce qu’ils n’avaient pas de marge de manoeuvre. Seule l’Arabie saoudite pouvait accroître son volume. C’est ce qu’elle a fait à l’époque, sous la pression de Washington.

Aujourd’hui, il est plus simple pour les pays producteurs de réduire leur production. Cela n’empêche pas la baisse des prix du pétrole de se poursuivre. Mais c’est un mouvement limité dans le temps. Car il va y avoir moins de pétrole sur le marché et les pays émergents comme la Chine et l’Inde continuent leur développement même si le taux de croissance est plus faible que ces dernières années. Enfin, il ne faut pas oublier que le pétrole n’est pas éternel. Plusieurs spécialistes estiment que le “Peak Oil” – le point culminant de la production – devrait être atteint entre 2020 et 2030. Il y a donc une combinaison d’éléments en faveur d’une remontée des cours pétroliers. Plusieurs économistes tablent du reste sur un niveau autour de 100 dollars d’ici la mi-2009. C’est-à-dire près de 40% de plus que le prix moyen de 72 dollars observé en 2007. Reste à savoir si la remontée du pétrole ne risque pas d’aggraver encore la crise économique.