Chine : soft landing

par Bei Xu, économiste chez Natixis

La Chine a enregistré un net ralentissement de la croissance en 2011 avec comme principaux facteurs, la décélération du commerce mondial et la restriction de l’investissement immobilier. Au premier trimestre 2012, le taux de croissance n’était plus que de 8,1% sur un an vs 8,9% en T4-11 et 9,7% début 2011.

Si l’ampleur du ralentissement a fait l’objet d’un vif débat, nous avons, à travers des analyses macroéconomiques et des observations des spécificités politico-économiques du pays, toujours défendu le scénario de soft-landing. Dans ce scénario, nous avons établi un profil de croissance en 2012 selon lequel le point bas du cycle devrait se situer au premier trimestre 2012, et l’activité devrait reprendre progressivement au cours du T2.

Au lendemain de la publication d’une batterie d’indicateurs économiques et de l’annonce d’une deuxième baisse du taux de réserves obligatoires, qu’en est-il des dernières informations disponibles concernant ce diagnostic ?

Globalement, les statistiques de l’activité économique durant les quatre premiers mois de l’année ont donné des messages très mitigés concernant la reprise et le timing de la reprise économique chinoise. Même si le mois de mars a été marqué par un timide rebond de la croissance de la production industrielle et des ventes au détail, les chiffres d’avril suggèrent que l’embellie du printemps ne sera probablement pas au rendez-vous. En effet, la production industrielle a atteint son plus bas niveau de progression depuis 35 mois ; les ventes au détail, aussi résistantes soient-elles, après avoir été « boostées » par la fin de subvention à l’achat d’électroménager en fin 2011 sont en train de tâtonner à la recherche d’une nouvelle dynamique.

En ce qui concerne l’investissement, sa progression nettement alourdie par celle de l’immobilier1, continue de glisser vers un niveau historiquement bas (20,2%2, le plus faible taux de croissance depuis 2003 !). Malgré la rigueur des mesures restreignant l’achat immobilier pour but d’investissement et/ou de spéculation qui pèsent sur l’investissement total, certains signes encore timides laissent pourtant espérer une amélioration de la dynamique d’investissement par le soutien public : la construction hors résidentiel a commencé à rebondir en mars en accord avec le sursaut de la mise en place des projets du gouvernement central. Parallèlement, les récentes réorientations vers le haut des indicateurs avancés comme les PMI (à la fois de HSBC et de NBS) semblent annoncer la prochaine amélioration de l’activité manufacturière en Chine. Sur le plan microéconomique sectoriel, la même tendance semble avoir été entamée en mars. C’est par exemple le cas des ventes d’automobiles et du fret dont les signes d’affaiblissement ne sont pas particulièrement prononcés.

En dépit d’une volonté de ralentir la machine économique au profit d’une meilleure qualité de croissance, les décideurs de politiques économiques veulent éviter un affaiblissement plus important que souhaité. Or, ils sont pris en tenaille, d’un côté par la volonté d’assurer une croissance correctement forte et de l’autre par la contrainte de minimiser les coûts de relance, qui peuvent être le risque inflationniste, la mauvaise qualité de croissance, l’envolée des prix des actifs et le risque de dégradation des déséquilibres existants dans l’économie. Ceci doit être l’esprit de la politique économique déjà mise en place, et devrait se poursuivre. Il consiste d’une part, à court terme, en une politique budgétaire accommodante et une politique monétaire prudente et stable, et à moyen et long terme, en une série de réformes déjà entamées.

D’ailleurs, le premier ministre Wen Jiabao a de nouveau insisté sur la priorité d’une croissance stable pour la Chine. Un certain nombre de mesures en faveur de la croissance ont été annoncées : 36,3 Mds de Yuan (4,5 Mds d’Euro) de subventions aux achats de produits d’économie de l’énergie, les équipements d’électroménager, d’éclairage, d’électromécanique et des voitures sont concernés. L’investissement en infrastructure constitue un autre axe important, des signes de reprise de la construction hors résidentielle ainsi que la mise en place des projets du gouvernement central sont déjà observables depuis mars. L’objectif n’est pas de rétablir une croissance de 10%, les effets collatéraux d’un stimulus massif type post-Lehman ayant bien servi de leçon, il s’agit de compenser le recul de la croissance qui serait trop important et d’assurer une croissance jugée correcte, qui s’établirait selon nous entre 8 et 8,5% cette année.

NOTES

1 En 2011, l’investissement du développement immobilier représente 25% de l’investissement total urbain.

2 Statistique en cumulé.

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